Intégrer l’objectif phonologique dans la quête du sens à l’oral en anglais
Introduction
Cet article émane d’une recherche collaborative qui vise à accompagner les enseignants du second degré à la recherche d’outils et de méthodes d’enseignement de la phonologie anglaise (Aromèphe). Ce projet de recherche entend répondre à divers besoins détectés lors d’observations de classes, d’entretiens avec des enseignants d’anglais stagiaires et/ou expérimentés. Il s’agit de besoins d’ordre :
- linguistique : les connaissances des enseignants en phonétique et phonologie sont parfois insuffisantes pour développer cette compétence chez les élèves ;
- pédagogique : on peut observer une difficulté à transposer les savoirs théoriques dans une visée communicative ;
- métacognitif : il est ardu d’adopter une posture réflexive sur sa pratique afin de sélectionner les gestes, les outils et les démarches pour atteindre les objectifs phonologiques visés ;
- pyscho-affectif : il s’agit d’encourager à considérer les obstacles en réception orale comme des défis à relever pour mieux comprendre les supports oraux.
Une réponse aux besoins précités pourrait amener les enseignants à mieux :
- arrêter des objectifs phonologiques ;
- concevoir des activités et des outils pour atteindre ces objectifs ;
- évaluer la compétence phonologique.
Dans cet article, nous nous interrogeons sur l’intégration de la phonologie dans un parcours d’entraînement à l’accès au sens d’un support sonore. Nous avons pu observer trois conditions qui semblent nécessaires à cette intégration :
- la définition d’objectifs pour lever les obstacles posés par le flux sonore ;
- la mise en place d’activités adéquates pour atteindre ces objectifs ;
- la prise en compte de la temporalité pour entraîner aux faits phonologiques.
Ainsi, en premier lieu, nous présenterons ces trois conditions avant de mettre en exergue les premiers résultats de notre expérimentation.
1. Conditions d’intégration de la phonologie pour exploiter un support sonore
1.1. Le choix des objectifs phonologiques liés aux difficultés de communication
L’intégration de la phonologie pour faire sens passe par le choix d’objectifs qui visent à mieux comprendre un support oral. En d’autres termes, il s’agit d’aider les apprenants à surmonter les difficultés qu’ils peuvent ressentir lors d’activités de réception orale. C’est à ce prix que l’on pourra arrêter des objectifs adéquats pour améliorer les compétences d’auditeurs.
1.1.1. Le fonctionnement de l’activité langagière de réception orale
Stéphanie Roussel définit la compréhension orale comme :
Une activité, une action. Le verbe « comprendre » vient du latin « cum » qui signifie « avec », et « prehendere » qui signifie « saisir ». Comprendre ce n’est donc pas recevoir passivement l’input sonore, c’est le « prendre avec soi » […] pour construire du sens. (2014)
Cette définition rejoint celle de Claire Bourguignon (2015, 89) pour qui « comprendre c’est construire du sens et donc rechercher les indices qui amènent à réduire l’incertitude ». Dès lors, le rôle du professeur est de baliser un parcours d’apprentissage dans lequel les apprenants sont amenés à émettre des hypothèses, les valider ou les infirmer. Pour accéder au sens du message, ils devront repérer des indices situationnels, lexicaux, syntaxiques et surtout les indices suprasegmentaux :
- les voix ;
- les schémas intonatifs ;
- les accents de mots et de phrases, etc.
En outre, dans une approche constructiviste, pour aider les apprenants à comprendre un message oral, l’enseignant devrait les encourager à mettre en place des stratégies liées aux processus qui entrent en jeu dans l’acte de réception d’un message. Ils sont illustrés dans la Figure 1 ci-dessous.
Ainsi, dans l’acte de compréhension, interagissent des processus dits :
- descendants, de haut niveau « top-down » qui vont du sens à la forme : l’apprenant est amené à émettre des hypothèses sur le contenu du message à partir de ses connaissances schématiques (Anderson et Lynch, 1988). Il s’agit de structures mentales préexistantes liées à son vécu, sa connaissance du monde, des genres, etc. Richard Cauldwell (2013) reconnaît que nombre d’enseignants sont compétents pour entraîner les élèves dans ce domaine :
Most teachers have become experts in fostering the development of strategies such as predicting and guessing. We are also experts in methodology of fitting listening activities into a sequence of communicative tasks. (Cauldwell, 2013, 250)
- ascendants, de bas niveau « bottom-up » qui vont de la forme au sens : l’apprenant va traiter les informations (sons, mots, phrases) qu’il reconnaît pour construire du sens à partir d’un stimulus sonore. En fait, l’oreille va transformer des vibrations acoustiques en signaux nerveux qui seront décryptés par le cerveau. On comprend ainsi l’inconfort souligné par cet étudiant qui n’a vraisemblablement pas automatisé ce processus, quand il dit :
I believe I need to learn what the word sounds like when it is used in the sentence. Because sometimes when a familiar word is used in a sentence, I couldn’t catch it. Maybe it changes somewhere when it is used in a sentence. (Cauldwell, 2013, 15)
Cet apprenant souligne un problème récurrent dont nous n’avons pas toujours conscience en tant qu’experts de la langue : le décodage du flux sonore.
Cet objectif, lié aux processus de bas niveau, ascendants, est rarement pris en compte dans l’entraînement à la réception orale en raison d’un manque de connaissances en phonétique et en phonologie de l’anglais chez les enseignants. De ce fait, certains enseignants ont du mal à repérer les difficultés d’ordre segmental et suprasegmental qui permettent de décoder le flux sonore. Or, Celce-Murcia (2010) reconnaît que ce sont les apprenants les moins agiles qui bénéficieraient le plus de ces stratégies de bas niveaux pour percer le sens du message.
1.1.2. Définir des objectifs phonologiques pour segmenter la chaîne parlée
Buck (2001) met en avant des faits récurrents qui entravent l’accès au sens et qui doivent être intégrés à tout parcours d’entraînement à la segmentation de la chaîne parlée. Il s’agit d’amener les apprenants à repérer les formes réduites des mots grammaticaux, les phénomènes d’élision, de liaison, d’assimilation, etc.
Ainsi, après avoir repéré les difficultés d’ordre phonologique du support et arrêté les objectifs à atteindre pour les surmonter, il s’agira de mettre en place des activités pour opérationnaliser ces objectifs. Ceci constitue une deuxième condition à l’intégration raisonnée de la phonologie au service de l’accès au sens d’un message à l’oral.
1.2. Concevoir des activités pour développer la compétence phonologique
Une fois les faits phonologiques sélectionnés, l’enseignant devrait utiliser diverses activités telles que :
- la dictée et les textes lacunaires suggérés par Celce-Murcia (2001) et Harley (2000). Elle mobilise l’attention et les compétences linguistiques des apprenants
- le repérage de faits phonologiques à partir du script. Harley (2000) suggère de travailler à partir des groupes de souffle en faisant repérer les pauses intonatives. John Field (2009) propose un travail sur le repérage des formes réduites des mots-outils.
Par ailleurs, nous nous sommes appuyés sur les travaux de Bardol (2020) qui a tenté classifier les types d’exercices et d’activités phonologiques proposés dans plusieurs ouvrages selon 4 catégories nommées PDAE (Figure 2) qui renvoient aux tâches de perception, de discrimination auditive, d’appropriation et d’expression libre.
La Perception : il s’agit d’activités qui visent à inciter l’apprenant à percevoir les sons sous l’angle de la multisensorialité. Le son peut s’appréhender à travers divers canaux sensoriels : l’ouïe, la vue, le mouvement. La Figure 3 met en avant plusieurs exemples d’activités qui articulent ces canaux en faveur d’un apprentissage plus durable.
La Discrimination auditive : ces activités qui émanent des méthodes structuro-globales audiovisuelles s’avèrent efficaces pour entraîner l’oreille à dépasser le phénomène de « nativisation » (Andersen, 1983). En effet, la perception du flux sonore en anglais passe par le filtre de la langue maternelle. Ce phénomène est source de nombreuses perturbations quant à la réception des éléments segmentaux et suprasegmentaux et donc de l’intelligibilité du message. Les exercices de discrimination auditive (Figure 4) s’avèrent donc utiles pour s’assurer de la capacité des apprenants à repérer les faits phonologiques arrêtés.
L’Appropriation : les activités classées jusque-là portaient sur le repérage du fait phonologique. Les activités d’appropriation s’intéressent davantage à sa réalisation, mais aussi à la réflexivité pour peu que l’on mène une démarche inductive, inhérente à une pratique raisonnée de la phonologie. Autrement dit, on amène les apprenants à inférer des règles à partir d’éléments récurrents à l’instar de cette activité. Par ailleurs, les activités d’appropriation sont davantage liées à des tâches de communication plus ouvertes et contextualisées que les catégories précédentes, comme ce jeu de rôle sur les liaisons (Figure 5).
L’Expression : la phase d’expression constitue une catégorie d’activités qui permettent d’évaluer la compétence phonologique dans une production de sens libre à l’oral. Ces activités peuvent être évaluées à partir de grilles d’évaluation critériées multiniveaux (Figure 6) qui intègrent la phonologie à l’acte de communication.
Ainsi, s’il souhaite segmenter la chaîne parlée, l’enseignant devrait proposer aux apprenants des activités qui visent la perception et la discrimination des faits phonologiques qui entravent l’accès au sens. Ce travail sera bénéfique à condition que l’on :
- intègre les faits phonologiques à des moments-clés ;
- entraîne les apprenants sur la durée.
La prise en compte de la temporalité constitue, de ce fait, la troisième condition d’intégration de l’objectif phonologique.
1.3. La prise en compte de la temporalité pour introduire et entraîner aux faits phonologiques
Nous nous intéresserons aux moments propices d’introduction des activités phonologiques qui visent à segmenter la chaîne parlée. Puis nous montrerons en quoi l’hybridation, l’alternance du présentiel et du distanciel, peut être un levier pour accroître le temps d’entraînement.
1.3.1. L’introduction d’activités qui visent la segmentation de la chaîne parlée
Nous avons souligné le fait que les enseignants sont compétents dans le développement de stratégies cognitives qui facilitent le repérage d’indices dans les phases d’anticipation, de compréhension dite globale, détaillée, voire implicite. En revanche, pour amener les apprenants à segmenter la chaîne parlée, les activités de perception et de discrimination auditive présentées plus tôt pourraient être introduites selon diverses temporalités :
- La phase d’échauffement de « préparation de l’oreille » avant la phase d’anticipation du contenu du support. Le but de cette étape est de préparer l’oreille à la perception de faits phonologiques jugés difficiles par l’enseignant. Prenons le cas des mots « dits transparents » à l’écrit. S’il nous paraît vain d’encourager les apprenants à les repérer lors d’une écoute pour faire sens, on pourrait leur proposer une tâche qui explicite les raisons de cette « non-transparence » à l’oral (Figure 7). Par exemple, dans le mot <security> (/sɪˈkjʊərəti/), l’accent primaire tombe sur l’antépénultième (oOoo) et induit la diphtongue /ʊə/ en anglais britannique et aussi les voyelles relâchées (/ə/ et /ɪ/) dans les autres syllabes. Il serait donc judicieux de les inciter à mémoriser leur prononciation.
- En cours d’écoute, lors de la phase de compréhension détaillée, on pourrait amener les apprenants à repérer les éléments porteurs de sens en travaillant le rythme de la phrase. Par exemple, l’activité présentée sur la Figure 8 encourage les apprenants à répondre à des questions de compréhension détaillée, puis à compléter un texte lacunaire. Cette approche vise à vérifier leur compréhension et à s’assurer qu’ils ont su identifier :
- les mots lexicaux, naturellement accentués ;
- les mots « dits transparents » travaillés lors de la phase d’échauffement ;
- les formes faibles des mots grammaticaux.
- Lors d’une phase de post-écoute, on pourrait introduire des faits plus discrets ou d’un degré de complexité plus élevé mais tout aussi essentiels à la réception orale. Par exemple, les effets de sens de l’intonation pour appréhender l’implicite du message. Dans ce cas, on peut utiliser le script du support oral à des fins de repérage. Cette phase de post-écoute prépare aussi à la production orale et participe de la cohérence entre les activités de réception et de production.
Nous venons de proposer des étapes-clés d’introduction d’objectifs et d’activités phonologiques qui visent à lever les obstacles à la segmentation de la chaîne parlée. La temporalité joue également à un autre niveau. Si l’on souhaite que l’entraînement soit efficace et que les faits soient consolidés sur le long terme, il devrait se dérouler au-delà de la salle de classe. C’est pourquoi l’accroissement du temps d’entraînement passe nécessairement par l’ouverture du cadre spatio-temporel de la salle de classe. L’hybridation s’avère être un précieux levier pour atteindre ce dessein.
1.3.2. L’hybridation : un levier pour accroître le temps d’entraînement
On entend par hybridation l’articulation des modes présentiel et distanciel dans le but de favoriser les apprentissages. Selon Elke Nissen :
Le distanciel se caractérise par la non-coprésence physique des apprenants et de l’enseignant […] ce qui implique le recours aux technologies numériques en ligne. (2019, 42)
L’usage du numérique permet aisément de fluidifier l’articulation présentiel-distanciel pour peu qu’il y ait une adéquation entre la modalité, le type d’activités phonologiques et les instruments numériques. Par exemple, si l’objectif est le repérage de l’accentuation de mots aux suffixes contraignants, la modalité présentielle s’avère être le mode le plus adapté à la perception multisensorielle selon une unité d’action, d’espace et de temps. En revanche, les activités de discrimination auditive peuvent être travaillées en autonomie dans un espace-temps plus éclaté.
Nous venons de présenter brièvement trois conditions qui semblent nécessaires à l’intégration raisonnée de l’objectif phonologique à un parcours d’entraînement pour bâtir du sens à l’oral :
- Le choix des objectifs phonologiques ;
- La conception d'activités pour développer la compétence phonologique ;
- La prise en compte de la temporalité.
Ces conditions, telles des hypothèses de recherche, ont été vérifiées par le dispositif mis en place et les méthodes de recueil de données utilisées. Nous allons dorénavant présenter la méthodologie arrêtée.
2. Méthodologie
2.1. Le contexte de l’expérimentation
Nous partageons l’expérimentation en post-bac qui s’est déroulée sur six semaines entre janvier et mars 2023. Selon le référentiel de compétences (circulaire du 7 novembre 2020), la première année de la classe de BTS Commerce International suit une formation de trois heures de cours d’anglais par semaine et une heure en demi-groupe. L’évaluation de l’anglais (LV1) est intégrée à l’épreuve de relation commerciale interculturelle. Les six activités langagières sont évaluées au niveau B2 du CECRL. Il s’agit d’une classe qui comprend 25 élèves d’un niveau hétérogène, selon les résultats du premier semestre. Nous nous intéressons au dispositif qui a été mis en place à la lumière des conditions définies plus tôt.
2.2. Les éléments du parcours d’entraînement mis en place
2.2.1. Quels objectifs phonologiques ?
Nous avons arrêté trois objectifs phonologiques, à savoir la capacité des apprenants à repérer :
- les syllabes accentuées et les réductions vocaliques dans les mots transparents afin d’observer les différences entre le français et l’anglais ;
- les mots porteurs de sens, en particulier du lexique spécialisé relatif au commerce international ;
- les formes faibles des mots grammaticaux afin de mieux segmenter la chaîne parlée.
Ces objectifs ont été intégrés à un parcours d’entraînement qui avait pour but de développer des stratégies d’auditeurs transférables. La deuxième étape visait à concevoir des activités pour atteindre ces objectifs et les intégrer au parcours.
2.2.2. Quelles activités et selon quelle temporalité ?
Deux phases ont été retenues lors des activités de réception orale :
- une phase de pré-écoute visait à préparer l’oreille au repérage du lexique. L’enseignant a proposé des activités de discrimination qui encourageaient les élèves à écouter et repérer les mots entendus à partir d’une liste qui comportait plusieurs mots transparents et du lexique spécialisé en particulier sur l’environnement et l’éthique des affaires (Figure 7) ;
- une phase en cours d’écoute qui visait le repérage des mots porteurs de sens et des mots outils en vue d’une meilleure compréhension globale et détaillée. Pour ce faire, un travail à partir du script a été proposé lors de l’étape de compréhension détaillée. Lors de la phase de réponse aux questions, les élèves devaient compléter le script du support sonore à partir d’un texte lacunaire (Figure 8).
2.2.3. Quelle articulation présentiel – distanciel ?
C’est ici qu’il nous a semblé judicieux de placer les activités effectuées dans la phase de post-écoute. Elles participent de la cohérence entre l’entraînement en présentiel et en distanciel et permettent aussi de répondre au manque de temps exprimé par plusieurs enseignants. Nous avons ainsi donné aux élèves des tâches d’entraînement à distance. Elles visaient à favoriser la mémorisation du lexique spécialisé et le repérage des mots transparents à l’aide de logiciels. Les élèves devaient réviser le lexique spécialisé des supports précédents et apprendre le lexique du support suivant, en prêtant une attention particulière à leur prononciation et surtout à celle des mots transparents. Nous avons utilisé les logiciels :
- Quizlet qui permet aux élèves d’apprendre et d’écouter du lexique à leur rythme ;
- Quizinière qui permet de créer un parcours et de suivre l’activité de chaque apprenant à distance.
Nous venons de mettre en exergue les éléments du parcours d’entraînement proposé aux élèves, il s’agit dorénavant de considérer les effets sur la compréhension orale.
3. Méthodes de recueil de données
Afin de se rendre compte de la progression des apprenants, nous avons mis en place des tests de performance (Figure 11) à l’instar d’un pré-test et d’un post-test similaires. La passation de ces tests fut espacée de dix semaines de cours. L’enseignant a laissé 30 minutes aux apprenants pour répondre aux questions sur table. Il s’agissait d’évaluer leur capacité à :
- repérer les formes faibles ;
- repérer le lexique spécialisé à partir d’un exercice lacunaire ;
- répondre à des questions détaillées à partir d’un support sonore.
4. Analyse des résultats
Ainsi, dans quelle mesure peut-on intégrer la phonologie dans un parcours d’entraînement à l’accès au sens d’un support sonore ? Afin de répondre à cette question de recherche, nous avons vérifié si les trois conditions présentées plus tôt ont été remplies. Au vu des premières données récoltées, les progrès semblent évidents bien que limités. Nous discuterons des raisons lors de notre analyse.
4.1. Les apprenants ont-ils été capables de repérer le lexique spécialisé ?
Sur les 17/25 apprenants présents, nous observons un progrès chez 12 apprenants. 5 étudiants ont soit baissé (2), soit stagné (3). Cela pourrait s’expliquer par un manque d’implication des étudiants puisque, selon les questionnaires, 3 d’entre eux déclarent ne pas s’être entraînés sur le logiciel Quizlet. Toutefois, un entretien nous aurait permis de mieux comprendre ce manque d’engagement.
4.2. Les apprenants ont-ils été capables de repérer les formes faibles ?
Sur les 17/25 apprenants présents, des progrès ont été constatés chez 14 d’entre eux. Un étudiant a baissé et deux ont stagné. Une fois de plus, cela pourrait s’expliquer par le fait que deux d’entre eux n’ont jamais utilisé le logiciel Quizinière.
4.3. Les apprenants ont-ils été capables de mieux repérer les mots transparents ?
Sur les 17/25 apprenants présents, nous constatons un net progrès qui résulte d’un travail en amont à partir du logiciel Quizlet. En effet, selon les questionnaires, 18/22 élèves déclarent avoir travaillé à partir de ce logiciel en amont des activités de réception orale. On peut donc supposer que l’entraînement à partir de ce logiciel a favorisé la mémorisation de la prononciation des mots dits transparents à l’écrit. Ces résultats permettent d’attester dans une certaine mesure la pertinence des activités en distanciel et en présentiel dans un parcours d’entraînement à la compréhension orale. D’ailleurs 18/22 étudiants interrogés reconnaissent la cohérence de cette articulation.
4.4 Les apprenants ont-ils progressé en réception orale ?
Selon les 17/25 présents au pré-test et au post-test :
- 12 apprenants ont progressé ;
- 3 apprenants ont stagné ;
- 2 apprenants ont légèrement baissé.
Conclusion
Ainsi, quel parcours d’entraînement peut-on mettre en place pour favoriser la quête du sens d’un support sonore en anglais ? Au vu de notre petit échantillon, il est difficile de tirer des conclusions. Toutefois, selon notre contexte précis, on peut observer la pertinence d’un entraînement compréhensif qui intègre les processus de bas niveau aux processus de haut niveau. C’est dans cette visée que nous avons encouragé le repérage et la mémorisation de plusieurs faits phonologiques (formes faibles, accents de mots, réductions vocaliques, etc.) qui permettent de segmenter la chaîne sonore et de lever certains obstacles d’accès au sens d’un support sonore. Cette démarche est aussi dépendante d’une temporalité précise (pré-écoute, en cours d’écoute, post-écoute) en présentiel et en distanciel. Les premiers résultats sont encourageants malgré le petit nombre d’étudiants qui ont pris part à cette expérimentation. L’entraînement a été jugé pertinent par la majeure partie des étudiants (20/22) puisqu’il a engendré un accroissement de l’entraînement et une prise de conscience du phénomène de formes faibles pour ne citer que ces raisons. Toutefois, pour améliorer ce parcours d’entraînement, il nous semble nécessaire que :
- les enseignants s’assurent du travail fait à distance à partir des logiciels (ici, Quizlet et Quizinière) mis à la disposition des étudiants puisque la plupart de ceux qui ont baissé ou stagné entre les pré tests et les post tests de performance ne se sont pas entraînés à distance ;
- un entretien soit opéré avec les apprenants afin d’encourager la prise de recul métacognitive car dans les questionnaires, peu d’entre eux ont été capables de justifier leurs réussites et leurs échecs au regard de la construction de leur compétence phonologique pour mieux comprendre un support oral. Cette prise de conscience induirait davantage d’engagement et encouragerait leur autonomie langagière et méthodologique.
Bibliographie
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SCRIVENER, Jim. 2011. Learning Teaching: The Essential Guide to English Language Teaching. London : Macmillan Education.
Références des logiciels en ligne
Quizlet : https://quizlet.com/latest
Quizinière : https://www.quiziniere.com/login
Pour citer cette ressource :
Frank Bardol, Daniel Petit, Intégrer l’objectif phonologique dans la quête du sens à l’oral en anglais, La Clé des Langues [en ligne], Lyon, ENS de LYON/DGESCO (ISSN 2107-7029), décembre 2024. Consulté le 18/12/2024. URL: https://cle.ens-lyon.fr/anglais/langue/integrer-l-objectif-phonologique-dans-la-quete-du-sens-a-l-oral-en-anglais