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«Criaturas abisales» de Marina Perezagua

Par Caroline Bojarski : Titulaire d'un Master 2 Pro (Traduction littéraire et édition critique) - Université Lumière Lyon 2
Publié par Christine Bini le 06/06/2012

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Publié en mai 2011 aux Éditions du Lince, ((Criaturas abisales)) rencontra un vif succès en Espagne. Constitué de quatorze nouvelles, ce recueil brave les limites de la "normalité" et du politiquement correct en nous présentant des créatures excentriques et machiavéliques, se cachant sous des traits angéliques.

PEREZAGUA, Marina, Criaturas abisales, Barcelona, Ed. Los libros del Lince, mai 2011, 139 p.

Marina Perezagua est une Sévillane de 34 ans. Après avoir suivi des études d'Histoire de l'art à l'Université de Séville, elle a été professeure de littérature à l'Université Stony Brook de New-York pendant cinq ans, puis professeure d'espagnol à l'Instituto Cervantes de Lyon pendant un an. Bénéficiant d'une bourse d'écriture de deux ans, elle s'établit de nouveau à New-York à la rentrée 2011, participant également à un Master d'écriture créative en espagnol en collaboration avec l'écrivain Antonio Muñoz Molina.

cubierta-223_1339018036900.jpgPublié en mai 2011 aux Éditions du Lince, Criaturas abisales rencontra un vif succès en Espagne. Constitué de quatorze nouvelles, ce recueil brave les limites de la "normalité" et du politiquement correct en nous présentant des créatures excentriques et machiavéliques, se cachant sous des traits angéliques. Une femme mangeuse d'hommes, une langue dévergondée, un homme qui donne le sein ou un couple que l'on rejette à la mer car non conforme aux exigences de la société. En utilisant les genres les plus diverses (fantastique, merveilleux, science-fiction), Marina Perezagua met le doigt sur nos douleurs les plus profondes et met en scène la folie humaine d'une manière kafkanienne. Chacun est amené à se questionner sur la notion de normalité, la force de l'amour, du désespoir, ou de la sexualité. Effrayantes, singulières, attendrissantes, les "créatures" qui peuplent ce recueil ne vous laisseront sûrement pas indifférents.

Le point commun de ces créatures est leur appartenance à un système qu'elles arrivent à manipuler ou dont elles subissent la rigidité. Pourquoi ne pas utiliser la chirurgie plastique, si nous ne voulons plus que nos parents nous ressemblent ? Pourquoi ne pas créer un tapis générateur d'électricité à l'aide du mouvement engendré par nos corps, si la technique nous le permet ? Pourquoi ne pas aller s'exposer dans un cirque si notre particularité physique peut attirer les foules ? Mais que faire, quand on est dans le coma et que notre mère décide de nous débrancher, en dépit de notre soif de vivre ? Le langage de Marina Perezagua est clair, limpide, mais en rien simpliste. Le lecteur ne s'ennuie pas une seule seconde en lisant les témoignages, les histoires ou les confessions de ces créatures qui, en y réfléchissant bien, ne sont pas si éloignées de nous. Plus que de simples témoignages, ces contes sont des questions sans réponse que chacun est amené à se poser sur nos émotions, et ce que nous refoulons. Dans une société comme la nôtre, le droit à la folie ou à la différence est bien limité. Même si l'existence de tels spécimens n'est pas avérée et que l'évolution psychologique et physique dont ils font état ne ressemble en rien à ce que nous connaissons, il est possible que nous en apprenions beaucoup sur nous-mêmes au fil des pages de ce bestiaire hors-normes.

 

Pour citer cette ressource :

Caroline Bojarski, Criaturas abisales de Marina Perezagua, La Clé des Langues [en ligne], Lyon, ENS de LYON/DGESCO (ISSN 2107-7029), juin 2012. Consulté le 22/11/2024. URL: https://cle.ens-lyon.fr/espagnol/litterature/litterature-espagnole/bibliotheque/criaturas-abisales