«Hay que sonreír» de Luisa Valenzuela
Luisa Valenzuela, Hay que sonreír, Américalee Ficciones, 1966/Fondo de Cultura Económica de Argentina, 2007.
Luisa Valenzuela (1938, Buenos Aires) est une écrivaine argentine reconnue par ses compatriotes et traduite dans plus de dix langues dont principalement l'anglais. Élevée au rang de docteur honoris causa par l'Université de Knox en Illinois, elle est l'auteure de plus d'une vingtaine d'ouvrages (romans, nouvelles, essais). Elle débuta en tant que journaliste en travaillant pour des journaux tels que La Nación, El Mundo ou Crisis. Habituée à côtoyer les plus grands écrivains argentins grâce à sa mère Luisa Mercedes Levinson, c'est en s'éloignant de son pays qu'elle commença à écrire. Voyageuse invétérée, sa littérature réussit à donner un point de vue extérieur et acerbe de la société argentine. Féministe, orale, humoristique, créative, sa littérature s'inscrit dans la tradition de la littérature latino-américaine dont les plus grands représentants sont Julio Cortázar et Jorge Luis Borges.
Hay que sonreír est l'histoire de Clara, une jeune fille qui quitte sa petite ville natale de province pour tenter sa chance et trouver un mari à Buenos Aires. Par la force des choses, presque par hasard, Clara devient prostituée. Tout au long du roman, nous voyons évoluer cette jeune fille naïve et inexpérimentée qui s'éprend d'hommes qu'elle rencontre dans les rues, les cafés ou les hôtels de Buenos Aires. Après Victor et Carlos, elle tombe amoureuse d'Alejandro dont le mystère la captive mais qui se révélera être un homme frustré, incapable d'aimer qui que ce soit et qui prendra plaisir à l'humilier et à la dominer. Avec lui, Clara monte un numéro qui propose au spectateur de regarder la tête de la jolie jeune femme posée sur une table. Pour cela, Clara doit tenir une position très inconfortable pendant des heures tout en gardant le sourire, d'où le titre du roman : Hay que sonreír [Il faut sourire]. Ce numéro représente pour elle la possibilité d'exister non plus grâce à son corps mais grâce à sa tête. Finalement, à bout de souffle, elle décide d'en finir avec Alejandro pour retrouver sa liberté, même si là encore, elle échoue.
Luisa Valenzuela a écrit ce roman à vingt et un ans, à Paris, loin de sa terre natale. C'est avec un regard extérieur qu'elle décrit les bas-fonds de Buenos Aires. L'intérêt de ce roman ne réside pas dans sa trame qui pourrait paraître sordide, mais dans l'aspect introspectif de la narration. Même s'il est écrit à la troisième personne, ce roman a les caractéristiques d'un journal intime. Son écriture en apparence simple, naïve et empreinte de régionalisme est en réalité un moyen efficace de contestation. Très ancré géographiquement ce roman peut néanmoins prétendre à une portée universelle. Écrit en 1959, ce roman aborde des préoccupations actuelles et introduit des thèmes récurrents dans l’œuvre de Luisa Valenzuela : la femme, la sexualité, la pauvreté, la domination, la ville.
Pour citer cette ressource :
Caroline Bojarski, "«Hay que sonreír» de Luisa Valenzuela", La Clé des Langues [en ligne], Lyon, ENS de LYON/DGESCO (ISSN 2107-7029), décembre 2012. Consulté le 05/11/2024. URL: https://cle.ens-lyon.fr/espagnol/litterature/litterature-latino-americaine/bibliotheque/hay-que-sonreir