Vous êtes ici : Accueil / Civilisation / Civilisation espagnole / Du XVIIIème au XIXème siècle / «Carmen» de Frédéric Brémaud, Denis Goulet et Valérie Vernay

«Carmen» de Frédéric Brémaud, Denis Goulet et Valérie Vernay

Par Caroline Bojarski : Titulaire d'un Master 2 Pro (Traduction littéraire et édition critique) - Université Lumière Lyon 2
Publié par Christine Bini le 18/02/2013

Activer le mode zen PDF

Présentation de la bande-dessinée "Carmen", de Brémaud (scénario), Goulet (dessin), et Vernay (couleur) et ressources complémentaires sur la nouvelle originelle de Prosper Mérimée, écrite en 1845.

 

Carmen, la bande-dessinée

Qui n'a jamais entendu le célèbre air de l'opéra Carmen de Bizet « L'amour est enfant de bohème, il n'a jamais, jamais, connu de loi, si tu ne m'aimes pas, je t'aime, et si je t'aime, prends garde à toi, prends garde à toi ! », chanté par la Carmencita devant les hommes de Cordoue et bien sûr Don José, dont la fleur, lancée par Carmen sur son cœur, marquera le début d'un amour passionnel ?  Et cet air, que le gardien de musée de L'oreille cassée chante, en passant le balais : « toréador, en ga-a-a-arde! toréador toréador toréador et trala-la-la-la la la la la un œil noir te regaaaaaaarde », ne vous semble-t-il pas familier ? Cependant, saviez-vous que Don José était originaire du Pays basque, qu'il s'appelait en réalité José Navarro, et que c'est à cause d'une querelle qu'il est devenu soldat, puis brigadier, à Cordoue, fuyant sa terre natale ? Et Carmen, la bohémienne, savez-vous pourquoi elle se retrouve en prison avec comme geôlier Don José ? Relire Carmen, cette nouvelle de Prosper Mérimée, sous forme d'une bande-dessinée, c'est se replonger dans une œuvre passionnante et colorée, qui est devenue l'un des opéras les plus joués au monde.

L’œucarmen-brremaud_1361203348824-jpgvre de Prosper Mérimée, intitulée Carmen, fut publiée pour la première fois en 1945 dans la Revue des deux mondes, puis en 1846 par les éditions Michel Lévy frères, instalées à Paris, dans un recueil comprenant également deux autres nouvelles : Arsène Guillot et L'Abbé Aubain. Composée de quatre chapitres, la nouvelle se veut l'illustration de l'amour tragique et de la jalousie, qui conduisent les hommes à adopter des comportements les éloignant de la raison. Même si l'histoire principale est bien celle d'un brigadier tombant éperdument amoureux d'une bohémienne, celle-ci n'est pas le point de départ de la narration. En effet, cette histoire n'apparaît qu'à un deuxième niveau dans le discours narratif, car Mérimée utilise un procédé connu sous le nom de récit « enchâssé » ou plus simplement de « récit dans le récit ». Cette technique est caractéristique des romans picaresques dans lesquels le ou les personnages principaux se taisent pour laisser un personnage extérieur raconter son aventure. C'est par exemple le cas du roman Jacques le fataliste et son maître, de Denis Diderot, dans lequel l'histoire principale, le « récit cadre », est sans cesse interrompu par des digressions. Dans Carmen, le « récit cadre » est celui d'un architecte français voyageant en Andalousie, accompagné par son guide. Sur son chemin, il va croiser à plusieurs reprises un homme, José Navarro qui, condamné à mort, lui fera le récit de sa vie, et plus particulièrement de sa rencontre avec une femme qui fit basculer sa vie.

Le chapitre le plus connu et développé dans les adaptations de Carmen est le troisième, car il commence directement par le récit enchâssé dans lequel Don José rencontre Carmen, tombe amoureux d'elle instantanément, puis devient terriblement jaloux de tous les hommes qui l'entourent. La bande-dessinée est en adéquation avec le texte original puisqu'elle suit précisément toutes les étapes de la vie amoureuse de Don José et de Carmen : rencontre devant la manufacture, arrestation de Carmen, fuite de celle-ci, séjour en prison de Don José, retrouvailles, assassinat par Don José d'un gradé amant de Carmen, début de sa vie de vagabond, découverte du mari de Carmen, meurtre de celui-ci, jalousie envers le torero, meurtre de Carmen. Au delà des nombreuses péripéties qui structurent l'histoire, ce que l'on retient généralement de Carmen, c'est le thème de la passion amoureuse. Le pouvoir envoûtant de la séduction et celui destructeur de la jalousie. Néanmoins, Mérimée dépeint aussi une époque, et un pays, en faisant se dérouler son histoire à Cordoue, dans une manufacture de tabac, puis dans les montagnes, à travers l'Andalousie.

Dans la nouvelle de Mérimée, il existe aussi un chapitre 4, souvent oublié dans les adaptations. Il s'agit d'un retour au point de vue narratif initial, donc à celui de l'architecte, qui fait part au lecteur d'observations de type encyclopédique sur les bohémiens. Il n'a pas été retranscrit dans la bande-dessinée, comme pour la majorité des adaptations.

Carmen, la nouvelle

Le texte de la nouvelle de Prosper Mérimée

Prosper Mérimée

(Paris, 28 septembre 1803 – Cannes, 23 septembre 1870)
prosper-merimee_1361202689838-jpgParisien d'ascendance normande, il est issu d'un milieu artiste, bourgeois et cultivé. L’œuvre qui le révélera est Le théâtre de Clara Azul (1825). Déjà dans ses premières œuvres mélodramatiques, il manifeste un intérêt certain pour  l'Espagne. Ce qui fait l'originalité de ses œuvres est un vif esprit de mystification, l'utilisation de la parodie et « un sens très sûr de la composition dramatique au service d'une juste intuition du passé »*. Il se distingue dans la maîtrise du récit court avec L'Enlèvement de la Redoute (1829), Tamango (1829), Mateo Falcone (1829), Une partie de trictrac (1830) ou les récits de Mosaïque (1833). Il s'illustre également dans le genre fantastique en s'aventurant aux frontières de l'inconnaissable avec Les âmes du purgatoire (1834), La Vénus d'Ille (1837), Lokis (1869) et Djoumâne (posth.). Nommé inspecteur général des Monuments historiques en mai 1834, il se consacrera pendant vingt ans à la préservation d'un patrimoine architectural menacé. Il est élu à l'Académie Française en 1844 pour ses travaux d'histoire romaine. Il est également reconnu pour avoir traduit de grands auteurs russes tels que Gogol, Pouchkine et Tourgueniev. Voyageur infatigable, c'est au cours d'un séjour en Espagne entreprit en 1830 qu'il trouvera l'inspiration pour écrire sa fameuse nouvelle Carmen. C'est la comtesse de Montijo, mère de la future impératrice Eugénie, qui en lui racontant une anecdote, fera germer en lui l'histoire de cette bohémienne aussi belle que dangereuse. Enfin, il se livre dans son œuvre Correspondance en se faisant chroniqueur de son temps et raconteur de sa « vie de vaurien ».
* Encyclopédie de la littérature, Librairie Générale Française, 2003.
Ecouter sur le site de l'Académie française "Les sept vies de Prosper Mérimée", par Pierre Pélissier

Carmen, l'opéra

Manuscrit de la partition de Georges Bizet
Livret de Meilhac et Halévy
Cinquantenaire de la création de Carmen (Opéra de Paris, 1959)
Maria Callas chante "l'amour est un oiseau rebelle"
Extrait du film Carmen de Francesco Rosi
"Près des remparts de Séville"
(Placido Domingo et Julia Migenes Johnson)
Extrait du film Carmen de Francesco Rosi
"Toréador"
(Ruggero Raimondi)

Carmen de Saura

La tabacalera

 

Pour citer cette ressource :

Caroline Bojarski, Carmen de Frédéric Brémaud, Denis Goulet et Valérie Vernay, La Clé des Langues [en ligne], Lyon, ENS de LYON/DGESCO (ISSN 2107-7029), février 2013. Consulté le 21/11/2024. URL: https://cle.ens-lyon.fr/espagnol/civilisation/histoire-espagnole/les-grandes-figures/carmen-bd-