«La ricotta» (P. P. Pasolini) / «Bellissima» (L. Visconti)
Introduction
Si le cinéma de Pasolini est caractérisé par ses paraboles poétiques et humaines, par la force des formes d’expression utilisées, du théâtre à la prose, avec une volonté d’être présent dans la vie sociale italienne comme intellectuel engagé, l’expérience de Visconti se situe plus dans la recherche d'une forme filmique grandiose qui renvoie au mouvement du grand opéra italien (Visconti fut aussi directeur de spectacles d’opéra).
Les deux réalisateurs ont aussi en commun leur lien à la France : Visconti a commencé à travailler dans le cinéma comme assistant de Jean Renoir et il a été un ami proche de Jean Cocteau et de Coco Chanel. Pasolini, quant à lui, a réalisé La Ricotta pour un film collectif (Ro.Go.Pa.G.) dans lequel Godard également présent. Il a souvent travaillé avec des acteurs français (Pierre Clementi, Jean-Pierre Léaud) et il est plusieurs fois intervenu dans le débat publique français au travers d'interviews et de quelques apparitions à la télévision.
Les chemins de Pasolini et Visconti sont comme deux quais parallèles mais qui ne se rencontrent jamais : militants controversés pour leurs prises de position très affirmées, considérés comme scandaleux du fait aussi de leur homosexualité, membres du PCI (Partito Comunista Italiano), ils ont été des représentants de l’élite culturelle du pays et ont décliné leur vision personnelle des années 1950-60 et du début des années 1970 italiennes avec une optique critique différente, mais où l'on retrouve une même rage et une même ironie mordante. Leur sens du cinéma s'est imposé comme la pierre angulaire de l'âge d'or du mouvement cinématographique italien.
La Ricotta, 1963, 40 minutes
La Ricotta, film considéré comme blasphématoire, fut censuré en Italie. Grâce à la défense passionnée d'Alberto Moravia, le film sera néanmoins partiellement réhabilité.
Avec Orson Welles, Pasolini met en scène la passion du Christ : le film est une sorte d'essai de méta-cinéma ante litteram et constitue de ce fait une parfaite introduction à l'esprit pasolinien. Revendiquant une liberté expressive totale par ses images et son contenu, c'est avec une vitalité enragée, montrée par la performativité des scènes, que Pasolini relit et détruit la vision commune de la crucifixion du Christ pour déboucher, en guise de final, sur un paradoxe des plus directs.
Bellissima, 1951, 102 minutes
Bellissima est une petite encyclopédie du cinéma italien, par ses acteurs et son esprit. Il met en scène une des plus grandes actrices italiennes, Anna Magnani (Roma città aperta, Mamma Roma,...). Il est réalisé d'après le scénario de Cesare Zavattini (le plus proche collaborateur de Vittorio De Sica, réalisateur de Ladri di Biciclette; de La Ciociara, de Matrimonio all'italiana…). Il est mis en scène par Suso Cecchi D'Amico (qui a également travaillé avec De Sica, avec Michelangelo Antonioni et avec Mario Monicelli) et par Francesco Rosi (réalisateur de Salvatore Giuliano, de Le mani sulla città, de Cadaveri Eccellenti). Alessandro Blasetti (Liolà, Simon Bolivar) y fait par ailleurs un bref cameo.
Ce film, s'il reflète l'esprit du néo-réalisme, marque aussi par la légèreté engagée de l'histoire qu'il va raconter. Il parle de la foi en la vie d'une mère qui veut le meilleur pour sa fille et qui va découvrir un monde où l'unique espoir est la vie même.
Pour citer cette ressource :
Alessio Librizzi, "«La ricotta» (P. P. Pasolini) / «Bellissima» (L. Visconti)", La Clé des Langues [en ligne], Lyon, ENS de LYON/DGESCO (ISSN 2107-7029), février 2017. Consulté le 15/10/2024. URL: https://cle.ens-lyon.fr/italien/arts/cinema/la-ricotta-p-p-pasolini-bellissima-l-visconti-