Les écrivains espagnols selon Florence Delay
https://video.ens-lyon.fr/eduscol-cdl/2009/2009-01-28_ESP_Delay.mp4
Florence Delay, « mes Espagnols »
Florence Delay est écrivain et traductrice. Agrégée d'espagnol, elle a enseigné la littérature générale et comparée à la Sorbonne. En 1962, elle a interprété le rôle de Jeanne dans Le Procès de Jeanne d'Arc de Bresson. Elle a obtenu le prix Fémina en 1983 pour Riche et légère le prix François Mauriac en 1990 pour Etxemendi le grand prix du roman de la Ville de Paris en 1999 et le prix de l'essai de l'Académie française pour Dit Nerval. Elle a toujours alterné romans et essais. A toujours collaboré avec des hommes de théâtre (Jean Vilar et Georges Wilson) et des cinéastes (Chris Marker, Hugo Santiago, Benoît Jacquot, Michel Deville). Elle a composé avec Jacques Roubaud, un cycle de dix pièces, Graal Théâtre, à partir des légendes arthuriennes. Elle a traduit de l'espagnol Jose Bergamín, Pedro Calderón de la Barca, Arnaldo Calveyra, Federico García Lorca, Ramon Gómez de la Serna, Lucas Fernández, Felix Lope de Vega, Fernando de Rojas, César Vallejo. Depuis 2000 elle est membre de l'Académie française. Elle a participé à la traduction de la Bible qu'ont éditée les éditions Bayard.
En 2008, Florence Delay a donné aux éditions Hermann Mon Espagne Or et Ciel, c'est le versant espagnol de son autobiographie intellectuelle. Voici ce qu'en a écrit Philippe Lançon pour Libération : « Une langue qui vous choisit est une histoire d'amour : elle la fait naître, on en vit. On ne meurt plus tant qu'on y rêve : on s'endort dedans. L'écrivain a aimé dans cette langue, donc elle dort bien. 'Dormir est ce que je fais de mieux, conclut-elle dans les dernières pages. Je dors avec une profondeur que n'égale aucune de mes pensées.' En espagnol, le même mot signifie rêve, sommeil et songe. La profondeur est là. C'est en lisant et traduisant Garcia Lorca, Miguel Hernandez, Cervantes, Calderón, Fernando de Rojas, Lope de Vega et José Bergamín que Florence Delay a saisi son risque et finalement sa vie : à travers eux, elle a compris que l'expérience poétique ne sert à rien si elle ne s'applique pas à notre vie et ne se vérifie pas dans le monde'. À propos de Calderón et de La Vie est un songe, qu'une professeure lui fit découvrir au lycée, elle résume comment les mots l'ont déterminée : 'il fait partie des écrivains qui me paraissent détenir sur moi une documentation personnelle'. Mon Espagne, composé de textes parfois publiés dans des revues, réunit cette documentation. C'est une autobiographie par la langue et la vie des autres. Florence Delay rend hommage et fait les portraits de ceux qui déposèrent l'Espagne en elle. À 15 ans, dans les années 50, après un mois passé en Catalogne, elle rencontre René Char. Il lui offre les poésies de García Lorca en disant : 'Traduis ce que tu aimes'. Puis il la publie dans une revue nommée La Carotide. D'entrée, par les mots le sang coule. De Lorca, elle lit Chant funèbre pour Ignacio Sanchez Mejías, poète et torero, encorné le 11 août 1934 et mort quarante heures plus t ard : "J'ai pleuré la mort du torero le plus célèbre de l'histoire de la poésie avant d'avoir assisté à une course de taureau et commencé d'entrevoir ce qui se passe dans une arène'". Les mots précèdent l'expérience et la forment. Quarante ans plus tard, pendant l'agonie de Franco, l'écrivain José Bergamín publie un texte sur la mort de ce torero, à laquelle il assista. Il est repris en 1981 dans la Solitude sonore du toreo, traduit par Florence Delay. Les pages qu'elle consacre à Bergamín sont les plus belles : la langue devient l'histoire d'un homme qu'elle a connu, aimé, lu et traduit.
Pour citer cette ressource :
Florence Delay, Les écrivains espagnols selon Florence Delay, La Clé des Langues [en ligne], Lyon, ENS de LYON/DGESCO (ISSN 2107-7029), avril 2009. Consulté le 27/11/2024. URL: https://cle.ens-lyon.fr/espagnol/ojal/traces-huellas/florence-delay