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«Journal de voyage à Paris» d'Horacio Quiroga

Par Elodie Pietriga
Publié par Elodie Pietriga le 13/10/2016

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Présentation du ((Journal de voyage à Paris)) de l'écrivain uruguayen Horacio Quiroga en 1900. Il avait alors vingt-deux ans et s'embarqua seul sur un paquebot à destination de Gênes, en Italie, d'où il prit le train pour rejoindre Paris. Paris le fascine mais il se retrouve vite sans argent et découvre la précarité.

 

L'écrivain

 

Horacio Quiroga, considéré aujourd'hui comme l'un des premiers grands "cuentistas" latino-américains, est né en 1878 à Salto en Uruguay. Sa vie est marquée par de nombreux drames, comme la mort de son père alors qu'il n'a que trois mois, celle de son beau-père dix-huit ans plus tard, ou celle de sa première femme. Ces tragédies expliquent sans doute que le thème de la mort soit récurrent dans ses nouvelles.

Horacio Quiroga commence à publier très jeune mais ce n'est qu'après son voyage à Paris qu'il connaît le succès avec le recueil de poèmes Los arrecifes de coral, influencé par le courant moderniste latino-américain. Après avoir tué accidentellement un de ses amis, il part s'installer en Argentine, à Buenos Aires, où il travaille comme professeur. Il publie un premier recueil de nouvelles, influencé par Edgar Allan Poe, El Crimen del otro. Suivront deux autres recueils quelques années plus tard. Puis il décide de se lancer dans les plantations agricoles et s'installe avec sa femme dans la province de Misiones au Nord du pays.

Après le suicide de son épouse, il retourne à Buenos Aires avec ses enfants et publie Cuentos de amor, de locura y de muerte qui rencontre un grand succès, de même que les nombreux recueils qui suivront. En 1925, il retourne à Missiones, puis se remarie. 

Le succès décline peu à peu car une nouvelle génération d'écrivains occupe désormais le devant de la scène littéraire. Atteint d'un cancer, il se suicide en 1937.

 

L'œuvre

 

Journal de voyage à Paris

 

Journal de voyage à Paris, traduit de l'espagnol par François Géal et les élèves de l'atelier de traduction de l'ENS de Paris, Presses universitaires de Lyon, 2016, 151 pages. ISBN : 978-2-7297-0905-1

 

Cette édition présente le journal qu'écrivit Horacio Quiroga lorsqu'il entreprit de se rendre à Paris en 1900. Il avait alors vingt-deux ans et s'embarqua seul sur un paquebot à destination de Gênes, en Italie, d'où il prit le train pour rejoindre Paris.

La traversée est longue et le jeune Horacio s'ennuie. Il pense à la femme qu'il aime et qu'il a laissée à Salto. Il passe aussi beaucoup de temps à lire et à écrire. À travers son journal, il livre de nombreuses réflexions sur le processus d'écriture : ses sources d'inspiration et ses difficultés.

 

Hier soir, pendant que je dormais, j'ai ruminé des idées littéraires. À peine levé aujourd'hui, je me suis mis à écrire ; après manger, je me suis remis à écire. À présent, je mets le papier de côté et je prends mon carnet. Je suis content parce que j'ai accouché de quelque chose qui m'a procuré une énorme satisfaction. C'est une fantaisie : [...] (p.42)

Arrivé à Paris, il est plein d'enthousiasme pour découvrir la ville, l'exposition universelle, les musées et les jardins. Paris le fascine, même si certains aspects de la ville le déçoivent:

... tous les monuments de Paris : un air misérable à cause de la couleur sombre, sale et tachée de tous les murs. (p.78)

Les oeuvres d'art l'inspirent et il rédige dans son journal plusieurs ébauches de poèmes comme La Vénus de Milo (p.82-83). Il rédige aussi à cette époque deux chroniques sur l'Exposition universelle qu'il publiera postérieurement dans le journal de Salto, La Reforma. Ces deux chroniques, très enthousiastes, contrastent avec la fin du journal qui témoigne des difficultés rencontrées à Paris.

En effet, la vie à Paris est chère. Horacio se rend vite compte qu'il n'a pas assez d'argent et écrit à des amis en Uruguay mais personne ne lui répond. Il se retrouve dans le besoin et doit faire appelle à la solidarité entre Sud-américains ce qui n'est ni simple ni agréable.

Faute d'argent il ne peut profiter pleinement des loisirs de la capitale. L'argent et les moyens de l'économiser deviennent une obsession comme en témoignent ses mentions constantes des prix et ses lignes de comptes. Horacio doit faire attention à chaque dépense et cela finit par tellement l'angoisser qu'il sombre dans une profonde tristesse et ne pense plus qu'au moyen de rentrer chez lui avant de mourir de faim.

Quelle angoisse! Par moments, je suis au bord des larmes. (p.94)

Ce journal constitue un excellent témoignage de ce que représentait un voyage à Paris au début du vingtième siècle pour un Uruguayen. La longueur du trajet, l'approximation des dates et des horaires de départ et d'arrivée ne sont que des vétilles comparées aux difficultés matérielles rencontrées sur place : communication avec le pays d'origine très compliquée, lenteur et retard postaux, retraits d'argent impossible, etc.

Il rend compte aussi de l'atmosphère des rues parisiennes, de la richesse artistique de la capitale française, des difficultés d'un étranger à y vivre et, bien sûr, du processus créatif puisque pendant ce voyage Horacio Quiroga trouve l'inspiration de plusieurs textes narratifs ou poétiques.

 

Pour citer cette ressource :

Elodie Pietriga, Journal de voyage à Paris d'Horacio Quiroga, La Clé des Langues [en ligne], Lyon, ENS de LYON/DGESCO (ISSN 2107-7029), octobre 2016. Consulté le 14/12/2024. URL: https://cle.ens-lyon.fr/espagnol/litterature/litterature-latino-americaine/la-dictature-dans-la-litterature/journal-de-voyage-a-paris-d-horacio-quiroga