Représenter la plantation dans le cinéma américain, du « Land of Plenty » au « locus horribilis » (1915-2020)
This lecture was organised by Virginie Thomas at Lycée Champollion (Grenoble)
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Introduction | 00:07 |
1. La nostalgie d'un Old South idéal (1915-années 1950)
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2. La plantation, un lieu de contrastes (années 2010)
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3. La plantation dans les films irréels : le présent du passé (années 2020) | 13:11 |
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Conclusion | 19:20 |
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La première moitié du XXe siècle est le temps de la mythologie de la Lost Cause. Le Sud, vaincu, subit l’occupation des soldats de l’Union après la fin de la guerre civile. Se met alors en place une narration du passé influencée par l’idéologie esclavagiste. L’idée d’une grande civilisation et d’un Old South pastoral perdus est née. Elle est durablement entretenue par les écrits, l’historiographie et surtout par les images des Antebellum Years portées à l’écran. Birth of a Nation (David W. Griffith, 1915), Gone With The Wind (Victor Fleming, 1939) et Song of the South (Wilfred Jackson, 1946) sont la mise en images d’une idéologie qui fait de la plantation un lieu idyllique et pastoral où s’épanouissent maîtres et esclaves en bonne harmonie. Le Southern way of life repose alors sur la culture d’une terre abondante et un ordre racial dominé par les Blancs et parfaitement accepté par les Noirs.
La fin du XXe siècle et le début du XXIe siècle, en écho notamment aux conquêtes sociales et légales des Noirs et leur accès aux droits civiques, permet aux réalisateurs de films de grand public de porter à l’écran une vision plus juste de la plantation. Cette dernière est un lieu de contrastes, le décor luxuriant de crimes et de souffrances. Le cinéma réaliste nourrit alors l’imaginaire collectif d’images plus proches de la réalité vécue par les esclaves, des crimes commis dans les plantations mais aussi des enjeux économiques de l’esclavage, qui n’est plus l’apanage d’un mode de vie idéalisé mais un système qui permet de tirer profit au mieux des ressources de la terre. Beloved (Jonathan Demme, 1998), Django Unchained (Quentin Tarantino, 2012), 12 Years a Slave (Steve McQueen, 2013) et The Birth of a Nation (Nate Parker, 2016) mettent en avant la mémoire douloureuse des esclaves et une vision plus crédible de la vie dans les plantations.
Enfin, l’entrée dans le XXIe siècle et particulièrement les années 2010-2020 marquent un tournant dans la représentation de la plantation par le cinéma mainstream. Des films qui s’éloignent délibérément du réalisme permettent de démontrer avec puissance le caractère durable de l’idéologie raciste et esclavagiste. Grâce à des éléments anachroniques, horrifiques, surnaturels, les réalisateurs se saisissent de la subjectivité mémorielle des Noirs pour faire de la plantation le lieu d’un traumatisme collectif, qui hante encore la société étatsunienne dans son ensemble près d’un siècle et demi après l’abolition de l’esclavage. La plantation devient le décor fictionnel des effets contemporains du mythe de la Lost Cause. Avec Bad Hair (Justin Simien, 2020) et Antebellum (Gerard Bush & Christopher Rentz, 2020), le genre de l’horreur permet d’introduire une vision critique de l’histoire et de l’actualité des questionnements sur le racisme aux États-Unis.
Pour citer cette ressource :
Clara Gonnet, "Représenter la plantation dans le cinéma américain, du « Land of Plenty » au « locus horribilis » (1915-2020)", La Clé des Langues [en ligne], Lyon, ENS de LYON/DGESCO (ISSN 2107-7029), septembre 2024. Consulté le 13/10/2024. URL: https://cle.ens-lyon.fr/anglais/arts/cinema/representer-la-plantation-dans-le-cinema-americain