La politique de défense de l’Espagne contemporaine, de la Transition à nos jours
Introduction
En 1985, le général Canales pointait déjà du doigt le flou qui entoure la définition du concept de défense nationale (Canales Morales, 1985, 458), lequel avait permis des manipulations politique et idéologique. De nos jours, la politique de défense est définie comme une politique publique et une politique d’État, ce par quoi on entend que sa définition dépend des intérêts de la nation et non pas d’une personne, d’un parti politique, d’une tendance idéologique ou d’un groupe de pression. Néanmoins, le concept de défense nationale n’a pas toujours été employé dans ce sens : il était déjà en vigueur sous le régime franquiste mais dissimulait une réalité autre. En effet, la conception franquiste de la défense était héritière de la conception de la nation défendue durant la guerre civile, d’autant plus que, compte tenu de la confiscation des pouvoirs par le dictateur, l’idée de nation se confondait avec le régime personnalisé élaboré dès avant la fin de la guerre et confirmé plus tard (BOE, 1967, 4326-4327). Cette défense de la nation de Franco est rappelée, dans la loi de l’État de 1967, par le rôle de l’armée comme garante de l’ordre institutionnel franquiste et, entre autres, par le contrôle des jeunes Espagnols à travers le service militaire (Velasco Martínez, 2017, 57-89).
Mais cette défense nationale qui, sous un même concept, cherche à donner l’illusion de l’unité et de l’homogénéité dissimule mal les fissures, oppositions et intérêts divergents. La création de trois ministères militaires séparés en est un exemple. Et l’obsolescence d’une armée espagnole qui peine à se moderniser favorisera également l’émergence d’initiatives visant la professionnalisation des militaires, comme le groupe Forja (entre 1951 et 1958), et de manière plus sensible mais toujours clandestine dans l’organisation UMD (Unión Militar Democrática) (Rodrigues, 2016, 395-397). Au sommet de la hiérarchie, le général de corps d’armée Manuel Díez-Alegría défendra, jusqu’en 1974, l’idée d’une véritable défense nationale et une transformation du rapport entre armée et société (Díez-Alegría, 1972). Il faudra attendre la fin de l’année 1976 pour que se mette en marche la réforme militaire, prélude nécessaire à l’apparition d’une politique de défense nationale. C’est dans un ordre chronologique que nous aborderons la réforme militaire en distinguant deux étapes de la longue transition militaire et de la défense (1976-1989 puis 1989-2004) avant d’aborder la politique de défense du premier XXIe siècle (2004-2016).
I. Transition militaire et politique de défense (1976-1989)
1. La réforme militaire de Gutiérrez Mellado
Couronné le 22 novembre 1975, Juan Carlos I, roi d’Espagne et nouveau chef de l’État, maintient Carlos Arias Navarro dans ses fonctions de président du gouvernement, mais force sa démission quelques mois plus tard. Le 3 juillet 1976, il nomme pour le remplacer (BOE, 1976, 13129), Adolfo Suárez, à qui il confie la tâche de démocratiser l’Espagne. Profitant de la démission du général De Santiago (Puell de la Villa, 2019, 323-335), vice-président du gouvernement en charge des affaires militaires, le 22 septembre 1976, Suárez nomme, pour le substituer, le général Manuel Gutiérrez Mellado (BOE, 1976, 18586). La transition militaire peut commencer…
Dès avant sa nomination à la vice-présidence du gouvernement aux affaires militaires, le général Gutiérrez Mellado avait présenté un rapport portant sur la situation générale de l’armée de Terre (Gutiérrez Mellado, 1976). C’est un véritable programme de réforme militaire dans lequel il dresse un état des lieux d’une armée franquiste, pointant ses insuffisances, ses carences et ses besoins. La diversité des problèmes soulevés et des solutions proposées fait apparaître nettement l’impératif de professionnalisation et dessine les contours d’une conception large de la défense nationale que l’on retrouvera dans les lois de Défense Nationale de 1980 et 1984. Le rapport propose une réforme structurelle et conceptuelle depuis l’idée de coordination interarmées, jusqu’à la révision de la politique du personnel et de l’enseignement militaire, en passant par la gestion des ressources économiques et la révision du Code de Justice Militaire. Les mesures prises, entre la nomination du général Gutiérrez Mellado et la promulgation de la Constitution (décembre 1978), permettent de retirer la gestion de l’ordre public à l’armée et de jeter les bases d’une réduction des effectifs et de leur rajeunissement. Le général Gutiérrez Mellado publiera deux autres rapports, en 1977 et 1978, dans lesquels il procèdera à un bilan des mesures adoptées pendant l’année écoulée et les mesures qu’il reste à mettre en place, ébauchant ainsi les contours d’une véritable politique publique à travers, notamment, la reddition de comptes à laquelle il s’astreint.
Dans la perspective du renforcement de la coopération interarmées, et dans la droite ligne des recommandations du général Díez-Alegría (entre 1971 et 1974), un ministère unique de la Défense est créé en 1977, dont le général Gutiérrez Mellado prend la direction jusqu’en 1979. Toutefois, ce ministère unique n’est qu’une coquille à l’intérieur de laquelle subsistent et se juxtaposent les administrations de chacun des trois ministères militaires. Parallèlement à la création de cette nouvelle entité, plusieurs mesures viennent jeter les bases politiques, doctrinales et conceptuelles de la coopération interarmées et de la défense : Gutiérrez Mellado dirige les travaux visant à actualiser les Ordonnances Royales, code de conduite du militaire datant du XVIIIe siècle et actualisé en 1978 puis en 2009. Ce nouveau cadre moral est approuvé le 28 décembre 1978, coïncidant avec la réforme des organes supérieurs de la défense, et parallèlement à l’approbation de la Constitution, le 29 décembre.
À ce stade, la défense nationale s’incarne dans deux structures parallèles : une structure militaire, dirigée par la Junte des Chefs d’État-Major (la JUJEM – Junta de Jefes de Estado Mayor) sous l’autorité du roi à qui la Constitution attribue le commandement suprême des Forces Armées ; et une seconde structure, politico-administrative, dirigée par le ministère de la Défense, dépourvue de commandement militaire, sous l’autorité du président du gouvernement. Néanmoins, cette situation pose la question de l’autonomie de l’armée qui, dans ces conditions, cherchera à se placer sous l’autorité directe du roi et non sous l’autorité d’un ministre civil. Et bien que la loi de Défense Nationale approuvée en 1980 soit la première de ce type, elle n’apporte aucune nouveauté par rapport à la loi de réforme des organes supérieurs de la défense, pas plus qu’elle ne répond à l’impératif d’assujettissement de l’autorité militaire à l’autorité civile. Il faudra pour cela attendre l’année 1984, date à laquelle le premier gouvernement socialiste de Felipe González approuvera une nouvelle loi de Défense Nationale, réformant la précédente. La loi de 1984 impose la stricte subordination de la chaîne de commandement militaire au pouvoir civil, crée le poste de Chef d’État-Major de la Défense et transforme la JUJEM en organe purement consultatif, avec le JEMAD (Jefe de Estado Mayor de la Defensa) à sa tête. Cette nouvelle hiérarchie place donc les Chefs d’État-Major des armées de Terre et de l’Air, et de la Marine, au sommet de la chaîne de commandement à l’intérieur d’une hiérarchie plus large dominée par le président du gouvernement.
2. L’opposition à la démocratisation
Toutefois, la Transition et la réforme militaire ne se firent pas sans résistances. L’historien militaire Fernando Puell de la Villa a bien montré qu’en 1975 l’armée espagnole se divisait en trois secteurs : une minorité de militaires démocrates (pour l’essentiel, membres de l’organisation clandestine UMD – Unión Militar Democrática), un secteur réactionnaire, issu du bunker idéologique (secteur ultra-réactionnaire du franquisme), et une masse indécise, constituant la majorité des militaires. C’est ce deuxième groupe, composé des fidèles de Franco, qui dirige la contestation face au processus de démocratisation du gouvernement d’Adolfo Suárez. Ainsi, en marge et s’appuyant sur un secteur civil et sur certains médias, se mettent en place des conspirations militaires et civilo-militaires qui trouvent leur point culminant dans la tentative de coup d’État du 23 février 1981 (Muñoz Bolaños, 2018, 15-37).
Pour expliquer le malaise qui se fait jour dans l’armée durant les années de la Transition, plusieurs raisons peuvent être invoquées : d’une part, le choc pétrolier de 1973 qui a entraîné une crise économique et l’augmentation du chômage en Espagne et, d’autre part, le climat d’insécurité créé par les attentats terroristes perpétrés par le groupe ETA. Si l’inflation et le gel des salaires des militaires ne firent que précariser davantage un secteur qui avait cessé d’être prioritaire sur le plan budgétaire, ce furent surtout l’effervescence sociale et la conscience que la fin du régime approchait qui participèrent au malaise dans l’armée. Par ailleurs, la nostalgie du régime précédent ainsi que la loyauté personnelle envers le Caudillo jouèrent un rôle non négligeable parmi les plus hauts responsables militaires qui avaient combattu aux côtés de Franco durant la guerre civile. Cette allégeance, ainsi que l’héritage interventionniste qui caractérise l’histoire politique de l’armée espagnole aux XIXe et XXe siècles, explique en partie la posture des militaires du bunker. À cet égard, Samuel Finer avait déjà décrit, en 1962, les modalités de cet interventionnisme militaire dans les affaires politiques, dont les quatre étapes (influence, extorsion, déplacement et remplacement) correspondent à l’évolution de l’attitude du secteur réactionnaire de l’armée, entre 1975 et 1982 (Finer, 1962, 1-5). En effet, celui-ci opte pour la désobéissance, l’intimidation et les menaces de violence face à la poursuite de la réforme politique par Suárez, notamment entre septembre 1976 et avril 1977, au moment de la légalisation du PCE (toujours identifié, par les thuriféraires du régime franquiste, à l’ennemi par excellence et considéré comme responsable de la guerre de 1936-1939). Les militaires du bunker idéologique tentent de ralentir la réforme politique envisagée par Suárez de manière à préserver les principes et les institutions du franquisme dont l’armée est la garante en vertu de la loi organique de l’État de 1967.
La période qui englobe les années 1977 à 1982 correspond aux deux dernières phases de déplacement et de remplacement, où l’on voit fleurir plusieurs conspirations militaires et tentatives de coup d’État parmi lesquelles l’Opération Galaxie (1978), le coup d’État du 23 février 1981 ou encore l’Opération Cervantès (27 octobre 1982). L’opération Galaxie, du nom du café madrilène où elle a été pensée, visait à faire occuper le palais de la Moncloa (siège de la présidence du gouvernement) par des unités de la Guardia Civil et commandées par le lieutenant-colonel Tejero. Parallèlement le capitaine Ynestrillas, de la police armée, devait investir certains points de la capitale pour assurer le succès de l’opération (Muñoz Bolaños, 2012, 133). L’opération Cervantes, qui devait avoir lieu la veille des élections prévues le 28 octobre 1982, prévoyait « la neutralisation des principaux centres de pouvoir civils et de commandement militaire ainsi que de toute personne qui se serait opposée à l’opération […] avant de déclarer l’état de guerre » et d’empêcher tout accès à Madrid (Muñoz Bolaños, 2020, 64). Ces deux opérations n’ont pas abouti.
Par son importance, la tentative de coup d’État du 23 février 1981 constitue le point culminant du conspirationnisme et de l’interventionnisme militaire pendant la Transition. Les conspirations et tentatives suivantes en 1982 puis en 1985, sans rien ôter de leur dangerosité, relèvent davantage d’un conspirationnisme résiduel. Initialement, la prise du Congreso de los Diputados correspondait à une opération du lieutenant-colonel de la Guardia Civil, Antonio Tejero Molina, mais elle est finalement intégrée à la « solution Armada » (apparue à l’automne 1979), consistant à donner la direction des opérations au général Armada, ancien secrétaire du roi, qui devait prendre la tête d’un gouvernement de concentration nationale incluant le PSOE et le PCE mais excluant les partis nationalistes. L’opération de Tejero devait constituer un facteur de déstabilisation justifiant la formation d’un gouvernement de concentration nationale pendant que le commandant José Luis Cortina Prieto (CESID – Centro Superior de Información de la Defensa) devait créer un climat anxiogène dans la classe politique et que le général Milans del Bosch, capitaine général de la IIIe Région Militaire (Valence), subordonnait toutes les conspirations militaires à la « solution Armada » et mobilisait l’armée. Le général de corps d’armée, Andrés Cassinello, rapportera dans ses mémoires que « le 23 Février rompit quelque chose de profondément enraciné dans l’armée. Après cela, le procès et le jugement contribuèrent davantage à rendre impossible l’idée selon laquelle il ne s’était rien passé » (Cassinello, 2022, 36-37), jetant, par là même, un discrédit durable sur les Forces Armées espagnoles, lesquelles ne commencèrent à retrouver quelque crédit qu’avec la reconnaissance progressive de leur participation aux opérations internationales des années 1990.
3. L’intégration internationale de la défense espagnole
La première transition militaire s’achève avec la réforme de la justice militaire et l’intégration des femmes dans l’armée. Dans le premier cas, il s’agissait de redéfinir les limites de la justice militaire au sein d’une nouvelle norme démocratique et de repenser le lien entre juridiction ordinaire et juridiction militaire. Les deux objectifs immédiats de la réforme de la justice militaire concernaient, d’une part, le nécessité de mettre fin au régime d’exception dont bénéficiaient les Forces Armées en matière juridictionnelle et, d’autre part, de mettre en œuvre la réforme du Code de Justice Militaire prévue par les Pactes de la Moncloa (1977).
Dans le second cas, un décret de février 1988 ouvre les Forces Armées espagnoles aux femmes. Cette ouverture s’inscrit dans une dynamique à la fois espagnole et européenne d’intégration féminine : elle vient confirmer la réinsertion des femmes dans l’espace social et politique après la dépénalisation de l’adultère (mai 1978), la légalisation du divorce (juin 1981) puis de l’avortement sous conditions (juillet 1985). Dans une perspective européenne, cette mesure parachève l’homologation de l’armée espagnole vis-à-vis des armées occidentales. Mais cette intégration ne sera pas un long fleuve tranquille puisque les femmes n’auront pas accès aux unités combattantes ni à des infrastructures adaptées immédiatement. Ce n’est qu’à partir de 1999 qu’elles obtiendront le droit de postuler à n’importe quel emploi, sans restriction. Mais il y a encore loin entre l’égalité établie par la loi et l’égalité réelle…
Si la question de l’intégration espagnole dans l’OTAN est indissociable de la renégociation de l’accord bilatéral hispano-nord-américain (Pactes de Madrid), elle n’apparaît pas tout de suite comme une évidence. Adolfo Suárez est tenté initialement par l’option neutraliste, comme en témoigne l’envoi en 1977 d’observateurs espagnols à la conférence des pays non-alignés (Muñoz Soro, 2016, 2). Cette option est également défendue par le PSOE pour d’autres motifs. Mais Adolfo Suárez fait finalement le choix de l’intégration dans l’OTAN après le IIe Congrès National de l’UCD (6-9 février 1981). Le coup d’État du 23 février impose également la nécessité d’une intégration rapide de manière à accélérer l’homologation de l’armée espagnole aux standards européens et à l’éloigner de la politique nationale. Cette intégration est d’autant plus nécessaire que le PSOE apparaît de plus en plus comme la principale force politique en Espagne et défend une stricte neutralité, expliquant la rapidité, voire la précipitation, avec laquelle est mené le processus d’intégration, dont le traité d’adhésion est signé en décembre 1981 et ratifié le 30 mai 1982. Le 28 octobre suivant, le PSOE accédait au pouvoir et gelait l’intégration espagnole dans la structure militaire de l’OTAN. Mais en quatre ans (1982-1986), Felipe González parvient à faire accepter à l’électorat socialiste la nécessité du maintien de l’Espagne dans l’OTAN, matérialisé dans le résultat favorable du référendum du 12 mars 1986, tout en maintenant le pays en dehors de la structure militaire intégrée. L’Espagne, distinguant les dimensions politique et militaire de l’OTAN, s’appuie sur le précédent créé par la France à partir de 1958 qui, tout en maintenant son appartenance à l’Alliance Atlantique, refuse de participer aux structures militaires de l’organisation (Vaïsse, 2009, 862).
Renégociés périodiquement depuis 1953, les Pactes de Madrid (Viñas, 2003) continuent de représenter pour certains secteurs de la société et de la classe politique, le symbole du soutien américain au régime franquiste, nourrissant un antiaméricanisme fort. Dès les années 1970, les renouvellements successifs ont cherché à rapprocher le cadre des accords bilatéraux de la norme OTAN, au moins dans la formulation. La dernière négociation des accords (1985-1988), qui mènera à l’établissement d’une relation plus équilibrée entre les deux partenaires, s’appuie, du côté espagnol, sur certaines revendications que relaie le président du gouvernement, Felipe González, en 1984, dans un extrait de son discours sur l’état de la Nation, connu sous le nom de Decálogo de Paz y Seguridad. Ainsi, le nouvel accord bilatéral, signé le 1er décembre 1988, suppose un rééquilibrage de la relation, avec un nouveau cadre juridique et implique une réduction du personnel américain en territoire espagnol de près de 37%.
II. Transition inachevée et introuvable modèle de Forces Armées (1989-2004)
1. Fin de la guerre froide : introuvable modèle
À cette première transition strictement espagnole se superpose la fin de la guerre froide et l’effondrement de l’Union Soviétique, qui impacte directement les économies, les armées et les modèles de défense occidentaux. La disparition de la principale menace permet, en Occident, de réduire les dépenses dédiées à la Défense, aux armées et aux armements ; ce sont les dividendes de la paix. Néanmoins, en Espagne, le besoin de modernisation, de professionnalisation et les efforts consentis pour la réforme militaire sont tels, que les budgets du ministère de la défense et le financement dédié à la modernisation de l’armement continuent d’augmenter. Mais on peut trouver une trace de ces dividendes dans la posture attentiste du gouvernement vis-à-vis des conclusions de la conférence de Vienne sur le désarmement qui doivent impacter la programmation et l’acquisition de matériel militaire (Diario de Sesiones del Congreso, 1990, 4649). L’augmentation du financement du ministère et des programmes d’armement ne sont ralentis que par la crise économique des années 1989-1993 qui oblige à revoir le calendrier de paiement et de livraison de nouveaux systèmes d’armement. Les considérations économiques prennent le pas sur la programmation politique et militaire.
Parallèlement aux dividendes de la paix dont bénéficient certains pays occidentaux, on observe en Espagne un double phénomène : l’augmentation du budget du ministère de la défense et la réduction de la part de la défense dans le budget de l’État. D’une part, le budget du ministère passe de 5,3 milliards d’euros courants en 1989 à 7,1 milliards d’euros en 2001. Mais d’autre part, ce financement occupe une part de plus en plus faible dans les dépenses de l’État, passant de 4,7% à 2,5%, évolution que l’on peut expliquer par la croissance de l’économie espagnole et la répartition des bénéfices au profit d’autres secteurs.
La fin de la guerre froide et la question économique ne sont que deux des multiples facteurs qui influencent la réflexion sur le modèle des Forces Armées. Pour l’Espagne il s’agit d’identifier un modèle de Forces Armées qui ne soit plus celui du franquisme mais qui s’adapte aux exigences de la sécurité collective (dans le cadre de l’OTAN et de l’UEO), des possibilités économiques du pays et de la réalité des menaces à la sécurité (intérieure et extérieure). À la lutte contre la macrocéphalie dans l’armée, à la réforme territoriale, qui impose une révision des effectifs militaires, s’ajoute le refus grandissant de la société espagnole de la prestation du service militaire obligatoire, visible par l’importance de l’objection de conscience et de l’insoumission, dans les années 1990.
Le refus du service militaire par la société, lié à la fin de la guerre froide et à l’émergence des nouvelles technologies, motive un modèle de Forces Armées moins dépendant du besoin de main-d’œuvre. Le débat sur le service militaire et le modèle des Forces Armées aboutira, en 1991, à un modèle mixte de recrutement fondé, d’une part, sur le recrutement obligatoire, et, d’autre part, sur le recrutement volontaire et professionnel. Modèle insatisfaisant pour le mouvement antimilitariste et qui aboutira à l’annonce de la suspension du service militaire obligatoire par José María Aznar (PP), le 3 mai 1996, suspension qui ne sera effective que le 1er janvier 2002.
2. La réforme inachevée : la seconde transition militaire
La réforme territoriale des années 1980 puis 1990 cherche à déconstruire l’implantation de l’armée franquiste dont les missions concernaient aussi bien la défense contre l’ennemi de l’extérieur que la lutte contre l’ennemi intérieur. L’implantation territoriale de l’armée permettait un quadrillage facilitant le contrôle de la population. À cet effet, le plan META, premier plan de restructuration, débute en 1984 et prévoit la réduction du nombre des régions militaires, impliquant également une importante réduction des effectifs ainsi que la disparition de la presque totalité des BRIDOT (Brigadas de Defensa Operativa del Territorio). Ce plan permet de réduire le nombre de brigades de 22 à 15 (sans compter les garnisons de Ceuta, Melilla, des Baléares et des Canaries). Ortega Martín évalue la réduction à près de 9000 cadres de commandements et 74 500 hommes du rang (Ortega Martín, 2008, 216).
Le plan RETO, qui prolonge le précédent, ouvre la seconde transition militaire des années 1990 et accompagne la décomposition du bloc soviétique et la redéfinition du rôle et du niveau de forces de l’OTAN. Déjà se trouve en germe le modèle d’armée conçue comme une force expéditionnaire. Le plan NORTE concrétise le besoin de restructuration et accentue la réduction des effectifs qui répond à la réduction du temps de prestation du service militaire et aux difficultés de recrutement de militaires du rang professionnels. L’implantation territoriale est entièrement revue impliquant une réduction des régions militaires de neuf (à l’époque franquiste) à quatre en 1997. Les régions militaires disparaissent au début des années 2000 mais laissent en héritage une division du territoire en trois sous-inspections générales de l’armée de Terre et une Direction de l’Intendance.
Cette évolution de l’implantation territoriale de l’armée est en partie conditionnée par l’opposition croissante au service militaire au sein de la société espagnole. Sorte de fabrique du citoyen sous le franquisme, le service militaire fait l’objet de plusieurs révisions durant la Transition en même temps qu’augmente le refus de sa prestation. Ce refus prend la forme de l’objection de conscience légalisée par la Constitution mais souffre du manque de cadre légal suffisant. La prestation de substitution mise en place en 1984 (BOE, 1984, 37366-37368) ne correspond déjà plus aux attentes de la société ni à celles du mouvement antimilitariste dont les positions ont basculé vers l’insoumission et l’exigence de suppression du service militaire. Les mauvais traitements reçus de la part des militaires professionnels, le taux de suicides et d’accidents ainsi que l’évolution de la situation stratégique mondiale et le soutien de la société civile, qui répugne à voir emprisonnés des jeunes entre 18 et 20 ans, constituent autant de motivations.
En conséquence, face à l’exigence sociale et le mouvement opéré par d’autres pays d’Europe occidentale, José María Aznar annonce, lors de son discours d’investiture, le 3 mai 1996, la suspension du service militaire. Prévue initialement pour le 31 décembre 2002, cette suspension sera avancée au 31 décembre 2001. Néanmoins, les gouvernements Aznar sont confrontés aux difficultés de recrutement illustrant le peu d’attrait de la profession militaire malgré les réformes et les efforts de récupération de crédibilité, de légitimité et de respectabilité sociale. En 1999, la loi portant régulation du régime du personnel des Forces Armées établissait le nombre de cadres de commandement à 48 000 et le nombre d’hommes du rang entre 102 et 120 000. Or, après la suspension du service militaire, le recrutement des effectifs oscille entre 45 523 (2004) et 47 057 (2002) pour les premiers, et entre 68 627 (2003) et 72 243 (2001) pour les seconds.
3. Un nouveau modèle de Défense
Les transformations de l’armée et du système de Défense Nationale en arrivent à configurer un nouveau mode de fonctionnement sur la base d’une philosophie renouvelée de la Défense, mais l’Espagne n’en prendra acte qu’au début des années 2000, à la fin de cette longue transition.
Les opérations militaires internationales (OPEX), sous mandat de l’ONU ou de l’OTAN, vont construire les nouvelles modalités de l’emploi des Forces Armées. En Espagne, l’armée commence à retrouver une forme de crédibilité en participant à ces opérations de maintien de la paix dès 1989 en Angola et plus tard, en ex-Yougoslavie ou au Proche et Moyen-Orient. En effet, l’armée n’est plus employée à des fins de répression ou de maintien de l’ordre public mais sert plutôt à préserver les intérêts de la nation à l’étranger ou à éviter, prévenir et maintenir la paix dans des zones instables. Cette participation est enfin facilitée par l’intégration de l’Espagne dans la structure militaire de l’OTAN, en 1999. Cette caution morale des OPEX favorise un progressif retour en grâce de l’armée auprès de la société, après les diverses conspirations et coups d’État des années 70-80. Néanmoins, ce nouveau mode de fonctionnement et d’emploi des Forces Armées ne va pas sans poser de problèmes économiques et financiers, car le budget ne suit pas et l’acquisition de matériel militaire moderne se poursuit lentement.
L’Espagne ne prend acte des transformations de l’armée et de la Défense qu’entre 2000 et 2003 avec la publication du Livre Blanc de la Défense (2000) et la Révision Stratégique de la Défense (2003). Si aucun de ces documents ne constitue un programme pour l’avenir, ils n’en sont pas moins une actualisation de la Défense au début des années 2000. Le Livre Blanc dresse un bilan des transformations militaires et du système de Défense, de l’intégration espagnole dans le système de sécurité euro-atlantique, et met en avant la fin de l’isolement hérité du franquisme ainsi que la réforme qui a conduit à la pleine professionnalisation de l’armée. La Révision Stratégique de la Défense propose, au contraire, une adaptation de la Défense aux circonstances stratégiques (attentats de 2001, terrorisme international) et un modèle de Forces Armées pour l’horizon 2015. Il s’agit, d’une part, de renforcer l’intégration et la participation espagnole à la sécurité collective, et, d’autre part, face à la recrudescence des OPEX comme modèle préférentiel d’intervention et de préservation des intérêts nationaux, il s’agit de passer d’un modèle territorial de Défense à un modèle fondé sur la projection de forces. Ces propositions, publiées sous le second mandat de José María Aznar (2000-2004) se verront appliquées dès l’année suivante dans le cadre de la transformation menée par les deux mandats du socialiste José Luis Rodríguez Zapatero (2004-2011).
III. Une politique de Défense pour le XXIe siècle (2004-2016)
Si l’Espagne parvient à clore un cycle transitionnel au début des années 2000, le panorama géopolitique et stratégique révèle les sources d’instabilité (locale, régionale ou nationale). Mais c’est la crise économique, ses conséquences, leur gestion et leur instrumentalisation, qui représentent le plus grand défi pour la politique de défense durant toute la décennie.
1. De la Défense Nationale à la Sécurité Nationale
En 2011, le gouvernement Socialiste publie la première Stratégie de Sécurité Nationale modifiée deux ans plus tard par le gouvernement Populaire. Elle consacre une nouvelle hiérarchie des concepts en affirmant le concept de sécurité nationale, concept global qui comprend la défense nationale (militaire) mais aussi la cybersécurité, la sécurité énergétique, humaine et alimentaire, environnementale, et la sécurité économique et financière. Les crises migratoires (2015, 2021), le COVID, l’affaire Pegasus, puis l’invasion russe de l’Ukraine ont démontré et continuent de démontrer l’impact de chacune de ces dimensions dans la sécurité d’une nation, où l’armée et la défense militaire ne constituent plus l’unique moyen de défense. Toutefois, cette nouvelle hiérarchie conceptuelle n’est que virtuelle et n’impacte aucunement la programmation des modalités de la défense et du maintien de la sécurité nationale. En 2015, une loi consacre le concept de sécurité nationale, avec la création d’un conseil de sécurité nationale, mais malgré plusieurs révisions de la stratégie de sécurité nationale et des directives de défense nationale, aucun lien n’est formellement établi pour lier les besoins de la défense nationale (militaire) à ceux de la sécurité nationale.
Dans ce contexte géopolitique, l’Espagne doit poursuivre sa mue et, dès 2004, entame une nouvelle transformation de l’armée qui donne lieu, entre 2004 et 2011, à l’approbation d’une nouvelle loi de Défense Nationale (2005), d’un nouveau code de conduite du militaire (Reales Ordenanzas, 2009), des droits et devoir des militaires (2011). Cette transformation renforce les compétences du Chef d’État-Major de la Défense, définit explicitement le besoin d’une armée conçue comme une force expéditionnaire, unifie les services de renseignement militaire (CIFAS). Pour la première fois, le Parlement est identifié comme acteur dans la définition et l’autorisation de l’envoi de forces militaires à l’étranger, bien que, dans les faits, sa participation se réduise à bien peu de choses.
Toutes proportions gardées, l’importance de cette refondation de la Défense espagnole est comparable à celle de la réforme militaire de la première transition militaire (1976-1989). On peut mesurer le chemin parcouru par les Forces Armées, qui apparaissent comme la première institution dépositaire de la plus grande confiance de la société espagnole : 20% en 2009 et 25% en 2017. Enfin, la Défense diversifie ses activités en promouvant une meilleure connaissance de l’armée par la société et une sensibilisation aux risques et menaces à la sécurité, à travers la promotion d’une culture de sécurité et de défense.
2. Crise économique et Défense Nationale
En 1995, un nouveau système d’acquisition de matériel militaire est mis en place en Espagne, fondé sur un préfinancement de la part du ministère de l’Industrie à destination des industries militaires. Le paiement après livraison consiste en un remboursement au Trésor Public. La forte augmentation des budgets de Défense jusqu’en 2009 permet au premier gouvernement de Rodríguez Zapatero (2004-2008) de lancer plusieurs grands programmes d’armement pour un montant total de près de 31 milliards d’euros. Ces nouveaux programmes (Navire de Projection stratégique, hélicoptères d’attaque Tigre, sous-marins S-80, véhicules de combat d’infanterie Pizarro ou encore le navire d’action maritime et la frégate F-100) sont facilités par des budgets de Défense à la hausse jusqu’en 2008-2009 : 9,7 milliards en 2008. Mais ils interrogent sur les modalités de financement, le modèle de planification et de programmation technique et financière de l’armement ainsi que sur la prise en compte des différentes temporalités de programmation : l’annualisation du financement de l’État et du ministère rend incertaine la projection à long terme requise pour ces grands programmes d’armement développés sur des périodes allant de 10 à 30 ans.
La crise économique de 2008 freine brutalement l’effort de modernisation de l’armement et impose aux gouvernements socialiste (Rodríguez Zapatero, 2008-2011) puis populaire (Rajoy, 2012-2018) d’opérer des réductions drastiques : le financement de la Défense diminue de 3 milliards d’euros entre 2008 et 2015. Pour assurer ces réductions, le ministère impose un taux de remplacement du personnel de 50%, réduit les dépenses destinées à la modernisation et au matériel militaire, tout en recourant, parallèlement, à un important financement hors budget pour les opérations internationales et les obligations financières des grands programmes d’armement. Les premières coûtent entre 600 millions et 1 milliard d’euros entre 2008 et 2015, auxquelles il faut ajouter les secondes, qui oscillent entre 800 et 900 millions d’euros par an durant la même période. Le Chef d’État-Major de la Défense assure que le manque de moyens menace d’obsolescence une grande partie du matériel alors que près de 50% du parc automobile blindé est à l’arrêt.
Le matériel commandé dans le cadre des programmes d’armement de la période socialiste (2004-2008) n’ayant pas encore été livré, la situation économique impose de reporter la date de livraison. La majorité parlementaire en viendra à affirmer que c’est en assumant ces restrictions budgétaires que les Forces Armées participent à l’effort de redressement économique de la Nation et à la Défense Nationale.
Conclusion
En résumé, l’Espagne est parvenue depuis 1976 à réformer son armée, archaïque, obsolète, héritée d’une dictature d’un autre temps, pour en faire une armée intégrée aux principales structures de défense et de sécurité collective dans l’espace euro-atlantique. Sa participation aux multiples opérations internationales (de combat ou humanitaires) illustre son dynamisme. Sur la base de la réforme de l’armée s’est constituée une véritable Défense Nationale à travers une transition en deux étapes, confirmée par son adaptation aux circonstances propres à ce premier XXIe siècle. Néanmoins, la politique de Défense espagnole pèche par manque de vision et de volonté politique dont témoigne une budgétisation trop soumise aux aléas économiques ou son utilisation partisane au Parlement.
Aujourd’hui, tant la création de la UME (Unidad Militar de Emergencias) que l’emploi de l’armée dans la lutte contre la Covid-19 montrent la normalisation du recours à l’armée pour des missions de type non militaire, redéfinissant l’armée comme outil de sécurité militaire mais aussi de sécurité sanitaire et environnementale. Enfin, la guerre en Ukraine a impliqué le réveil de l’OTAN, en « état de mort cérébrale » selon M. Emmanuel Macron (2019), et la fin de la neutralité de la Finlande et de la Suède par leur adhésion à l’Alliance, évoquant ainsi la guerre de blocs. Ce conflit a supposé également la fin d’une époque et le réveil géopolitique de l’Occident, illustrant ainsi « la fragilité d’un droit international incapable de générer des mécanismes adéquats pour assurer son respect » (Colom Piella, 2022, 162). Il comporte des implications budgétaires en Espagne : entre 2016 et 2022, le financement du ministère de la Défense a plus que doublé, passant de 6,8 à 14 milliards d’euros courants.
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Pour citer cette ressource :
Jules Rodrigues, La politique de défense de l’Espagne contemporaine, de la Transition à nos jours, La Clé des Langues [en ligne], Lyon, ENS de LYON/DGESCO (ISSN 2107-7029), avril 2024. Consulté le 03/12/2024. URL: https://cle.ens-lyon.fr/espagnol/civilisation/histoire-espagnole/monarchie-et-formations-politiques/la-politique-de-defense-de-lespagne-contemporaine-de-la-transition-a-nos-jours