Analyse d'oeuvre - «Hymne à la joie», «Fresque de Beethoven» 1902. Gustav Klimt
Quelques repères biographiques et artistiques
Gustav Klimt (1862-1918) est né à Baumgarten près de Vienne. Fils d’un ciseleur de métaux précieux, il rentre très jeune aux Beaux-Arts de Vienne et reçoit sa première grande commande publique à 17 ans avec son frère. Il fait d’abord des fresques monumentales autour de thèmes antiques ou historiques. Son style est alors très réaliste. Mais cette peinture conventionnelle ne l’intéresse pas. Devant exécuter trois fresques pour l’université en 1894, Klimt réalise des peintures sombres qui dénoncent les écueils de la Médecine, la Philosophie et de la Jurisprudence au lieu de louer ces sciences. D’un des peintres favoris de l’empereur et du gouvernement, il devient un opposant. En 1897, il fonde la Secession viennoise et en devient le président. Ce groupe d’artistes revendique un renouvellement de l’art et de la société par les arts. Dorénavant, Klimt vit surtout des faveurs de la grande bourgeoisie, en faisant des portraits des femmes de ses mécènes.
Ses tableaux sont célèbres pour l’utilisation de feuilles d’or et pour les nombreux détails et symboles des arrière-plans. Il peint surtout des femmes distantes et sensuelles, les hommes sont le plus souvent des personnages secondaires.
La XIVème exposition de la Secession, consacrée à Beethoven
En 1902, la Secession organise sa 14 ème exposition au Palais de la Secession, bâtiment moderne qui lui sert de musée. Cette exposition est consacrée à Beethoven et s’organise autour de la sculpture en marbre du compositeur réalisée par Max Klinger. Au sein du musée, Joseph Hoffmann construit une salle en béton (matériau très moderne pour l’époque), dans laquelle un orchestre joue en permanence. Ainsi, musique, sculpture et architecture se complètent en toute harmonie. L’objectif est de parvenir à une unité des arts, dans une œuvre d’art totale. Klimt s’occupe quant à lui de la peinture. Il s’inspire pour ses trois fresques de la neuvième symphonie du compositeur, et, particulièrement pour la dernière fresque, du poème An die Freude de Schiller que Beethoven a mis en musique dans le dernier mouvement.
An die Freude, Schiller
O Freunde, nicht diese Töne! Sondern laßt uns angenehmere anstimmen und freudenvollere.
Freude, schöner Götterfunken Tochter aus Elysium, Wir betreten feuertrunken, Himmlische, dein Heiligtum! Deine Zauber binden wieder Was die Mode streng geteilt; Alle Menschen werden Brüder Wo dein sanfter Flügel weilt
Wem der große Wurf gelungen, Eines Freundes Freund zu sein; Wer ein holdes Weib errungen, Mische seinen Jubel ein! Ja, wer auch nur eine Seele Sein nennt auf dem Erdenrund! Und wer's nie gekonnt, der stehle Weinend sich aus diesem Bund! Freude trinken alle Wesen An den Brüsten der Natur; Alle Guten, alle Bösen Folgen ihrer Rosenspur. Küsse gab sie uns und Reben, Einen Freund, geprüft im Tod; Wollust ward dem Wurm gegeben, und der Cherub steht vor Gott.
Froh, wie seine Sonnen fliegen Durch des Himmels prächt'gen Plan, Laufet, Brüder, eure Bahn, Freudig, wie ein Held zum Siegen. Seid umschlungen, Millionen! Diesen Kuß der ganzen Welt! Brüder, über'm Sternenzelt Muß ein lieber Vater wohnen. Ihr stürzt nieder, Millionen? Ahnest du den Schöpfer, Welt? Such' ihn über'm Sternenzelt! Über Sternen muß er wohnen. |
Ô amis, pas de ces accents ! Laissez-nous en entonner de plus agréables, Et de plus joyeux !
Joie, belle étincelle divine, Fille de l'assemblée des dieux, Nous pénétrons, ivres de feu, ô céleste, ton sanctuaire ! Tes charmes assemblent Ce que, sévèrement, les coutumes divisent ; Tous les humains deviennent frères, lorsque se déploie ton aile douce.
Celui qui, d'un coup de maître, a réussi D'être l'ami d'un ami; Qui a fait sienne une femme accorte, Qu'il mêle son allégresse à la nôtre ! Même celui qui n'a qu'une âme qui lui appartient sur la terre entière ! Quant à qui ne le trouverait pas, Qu'il quitte cette union en larmes ! Tous les êtres boivent la joie Aux seins de la nature ; Tous les bons, tous les méchants, Suivent sa trace parsemée de roses. Elle nous a donné des baisers et la vigne ; Un ami, éprouvé par la mort ; La volupté fut donnée au vermisseau, Et le Chérubin se tient devant Dieu.
Joyeux, comme ses soleils volant À travers le somptueux dessein du ciel, Hâtez-vous, frères, sur votre route, Joyeux comme un héros vers la victoire. Soyez enlacés, millions. Ce baiser au monde entier ! Frères ! Au-dessus de la voûte étoilée Doit habiter un père bien-aimé. Vous vous effondrez, millions ? Monde, as-tu pressenti le Créateur ? Cherche-le par-delà le firmament ! C'est au-dessus des étoiles qu'il doit habiter. |
L'oeuvre d'art totale, "das Gesamtkunstwerk"
Les Secessionistes s’inscrivent avec cette exposition dans l’héritage romantique avec pour idéal d’unifier les arts pour parvenir à un état originel où les hommes vivaient en harmonie avec le monde dans tout ce qu’ils créaient. A cette époque, on est subjugué par les créations wagnériennes où la musique et le drame se répondent sur scène. Cependant, du point de vue personnel de Klimt, retrouver l’harmonie et la simplicité dans son art est particulièrement nécessaire à cette période puisqu’il se trouve en plein milieu du scandale des toiles de l’université.
La fresque de Beethoven se divise en trois parties, qui ont été ultérieurement découpées pour des raisons pratiques en sept compartiments de deux mètres vingt de haut et de longueur variable. Dans la première partie intitulée L’Aspiration au bonheur, des femmes et des hommes agenouillés supplient un héros en armure dorée de retrouver la joie et le bonheur. Mais, au centre de la pièce, ce désir se heurte à la deuxième partie, les Puissances Ennemies. Là se trouvent les Gorgones effrayantes avec des serpents dans leurs cheveux, les trois allégories de L’Impudicité, La Volupté et La Tempérance, et un monstre velu qui se meut en un serpent gigantesque.
Bien que les deux premières parties de la fresque à Beethoven soient difficiles à aborder avec des collégiens, à cause de la nudité des personnages et de la violence de certaines images qui firent scandale à l’époque, le dernier tableau peut facilement faire l’objet d’une activité en cours. Il permet d’introduire ou de compléter une activité sur le poème de Schiller l’Hymne à la joie, et sur sa mise en musique par Beethoven, qui est devenue l’hymne européen. La frise étant très riche, les élèves peuvent s'entrainer à la description d'oeuvre. On trouvera ci-dessous une description et un début d'analyse dans les deux langues.
Description des tableaux
Premier panneau
La frise se lit de gauche à droite. Au début, on retrouve les génies qui flottent le long de la marge supérieure et qui étaient déjà présents dans le premier panneau. Ils ondulent comme de l’eau et leurs yeux sont fermés comme s’ils dormaient. Toute la partie inférieure de la frise est blanche, épurée, ce qui est très atypique pour Klimt qui aimait remplir au maximum ses tableaux. Ce blanc est donc voulu, probablement pour mieux signifier la pureté et la légerté du sentiment de bonheur naissant. Au contraire, la fin de la frise est plutôt surchargée pour symboliser la force de l'amour et de la joie.
Der Fries wird von links nach rechts gelesen. Anfangs sieht man Genien am obenren Rand schweben. Sie gleiten wie Wasser und ihre Augen sind geschlossen, als würden sie schlafen. Der ganze untere Teil des Bildes ist weiß und vereinfacht, was für Klimt eigentlich eigenartig ist, denn er wollte seine Bilder immer so sehr wie möglich füllen. Er hat das Weiße also bewusst benutzt, vermutlich um die Reinheit und die Einfachheit des beginnenden Glücks zu betonen. Im Gegensatz dazu ist das Ende des Frieses eher voll, um die Stärke der Liebe und der Freude auszudrücken.
Vers le milieu de la frise, au bord du premier panneau, les génies aboutissent à une allégorie de la poésie dans un nuage d’or. Cette figure féminine et sa harpe ressemblent étonnamment à celle que l’on peut voir sur un vase grec datant du cinquième siècle avant J.C. Ce sentiment est renforcé par la simplicité des traits et le peu de couleurs utilisées. Klimt cherche à représenter un temps légendaire d’harmonie (ce sont les grecs qui ont les premiers parlé de l’âge d’or). Avec cette figure, il introduit aussi le thème de la musique, qui est essentiel sur une fresque consacrée à Beethoven.
In der Mitte des Frieses, am Rande des ersten Bildes, kommen die Genien bei einer Allegorie der Poesie an und schweben über sie in einer goldenen Wolke. Überraschender Weise ähnelt diese weibliche Figur mit Harfe einer Frau auf einer griechischen Vase aus dem 5. Jahrhundert vor Christus. Dieser Eindruck ist umso stärker, als sie sehr einfache Züge hat und aus wenigen Farben besteht. Klimt will eine vergangene Zeit der Harmonie darstellen, und die Griechen waren die ersten, die von der Goldenen Zeit gesprochen haben. Mit dieser Frau veranschaulicht er auch das Thema der Musik, was auf dem Beethovenfries natürlich sehr wichtig ist.
Deuxième panneau
De l’autre côté, sur le deuxième panneau, après un grand espace blanc, des femmes aux yeux fermés semblent danser sur un fond or qui ondule et les englobe partiellement. Elles tendent les bras vers un chœur de femmes debout sur un lit de fleurs et se donnent les mains en signe d’harmonie. Ici, le manque de perspective fait plutôt penser à une enluminure du Moyen-Âge et aux anges du paradis. Le thème de la musique est encore présent puisque l’une d’entre elles tient un tambourin et que leur robes semblent onduler en mouvement réguliers. On reconnaît le dernier mouvement de la symphonie de Beethoven, riche en chœurs.
Auf der anderen Seite beginnt das zweite Bild nach einer großen weißen Fläche. Mehrere Frauen tanzen in einem goldenen Hauch. Sie halten die Augen geschlossen, während der Hauch sich bewegt und sie sanft umschlingt. Die obersten Frauen strecken die Arme zu einem Chor aus. Der Chor besteht aus vielen Frauen, die sich als Zeichen der Harmonie die Hände halten. Das Thema der Musik ist wieder anwesend, da die Frau links eine Trommel hält und ihre Kleider sich in wellenhaften Bewegungen zu schwingen scheinen. Man erkennt, dass es sich um eine Darstellung von Beethovens Neunte Symphonie handelt, weil es dort sehr viele Chore gibt.
Sur la droite de la fresque, le désir de bonheur trouve son aboutissement dans un couple qui s’embrasse, une illustration d’un des derniers vers de Schiller « Dieser Kuß der ganzen Welt ». L’harmonie de cette scène est due à l’unité des couleurs mais aussi au grand rosier qui entoure et protège les amants, complètement englobés dans le choeur. Au dessus d’eux, la lune et le soleil se font face, comme si tout l’univers les englobait.
Auf der rechten Seite der Freske findet das Streben nach Glück einen Höhepunkt in dem küssenden Paar, das Schillers letzte Verse "Dieser Kuss der ganzen Welt" illustriert. Die Einheit der Farben führt zur Harmonie der Szene, aber auch die großen Rosenbüsche und der Chor, die die Liebenden schützen. Über ihnen treffen sich die Sonne und der Mond, als würde das ganze Universum sie umschlingen.
Cependant, ce baiser ne manque pas non plus de tension. On ne voit ni le visage de la femme ni celui de l’homme car la femme le force à se pencher. Il s’élève comme un brasier de leur tête, leurs pieds sont comme ficelés par des vaguelettes d’eau. La couleur des rosiers n’est pas du tout chatoyante, au contraire, c’est plutôt un marron sombre et on voit très distinctement les épines des troncs. Est-ce seulement pour représenter l'intensité des sentiments et mimer la musique de Beethoven, qui entre à la fin de la symphonie dans un puissant créscendo? Peut-être cette tension reflète-t-elle aussi la condition des deux sexes à l'époque de Klimt, entre un début de libération et des préjugés encore très forts, même chez l'artiste.
Vocabulaire de la description de tableau
Die Bildvorstellung |
Einige Adjektive |
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Das Bild (-er) Der Fries (-e) Die Freske (-n) Die Malerei (-en) Das Gemälde (-n) Das Landschaftsbild Das Porträt (-s) Das Selbstbildnis (-se) Die Freske (-n) Die Skizze (-n) Die Zeichnung (-en) Die Karikatur (-en) Der Maler, die Malerin Der Karikaturist -in |
l’image, le tableau la frise la fresque la peinture le tableau le paysage le portrait l’auto-portrait la fresque l'esquisse le dessin la caricature le, la peintre le caricaturiste |
dunkel hell grell blass sanft harmonisch golden realistisch abstrakt kritisch gesellschaftskritisch schön häßlich nackt |
sombre clair de couleur vive pâle doux harmonieux doré réaliste abstrait critique... ...envers la société beau laid nu |
Die Bildbeschreibung |
Einige Verben |
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Auf dem/diesem Bild In der Mitte Im Zentrum Im oberen Teil Im unteren Teil Am Rande des Bildes Im Vordergrund Im Hintergrund vorne, vor etw. hinten, hinter etw. oben unten rechts links oben links von oben von der Seite von links nach rechts Auf der anderen Seite über neben zwischen… und… einerseits... andererseits |
Sur l'image, ce tableau Au milieu Au centre Dans la partie supérieure … inférieure Sur le bord de l'image Au premier plan À l’arrière-plan devant derrière en haut en bas à droite à gauche en haut à gauche d’en haut de côté de gauche à droite De l'autre côté au-dessus à côté entre … et … d'une part...d'autre part... d'un côté...d'un autre côté... |
Es handelt sich um… Es gibt +ACC Ich sehe… Man sieht , etw. ist zu sehen Die Szene spielt… erkennen entstehen bestehen aus +DAT sich befassen mit +DAT malen zeichnen ähneln +DAT scheinen zeigen aus/drücken betonen etw. illustrieren dar/stellen veranschaulichen symbolisieren stehen sitzen liegen |
Il s’agit de … Il y a… Je vois… On voit… La scène se passe reconnaître être réalisé être constitué de se consacrer à peindre, dessiner dessiner ressembler à sembler montrer exprimer souligner illustrer représenter ... symboliser se tenir debout être assis être étendu |
Seine Meinung sagen |
Einige Nomen |
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Meiner Meinung nach… Ich habe den Eindruck Im Gegensatz dazu... finden glauben denken mögen (ich mag) lieben kritisieren |
Selon moi… J’ai l’impression Au contraire,... trouver croire penser apprécier aimer, adorer critiquer |
Die Farbe (-n) Der Kontrast (-e) Der Farbkontrast (-e) Das Muster (-) Die Form (-en) Das Detail (-s) Das Licht (-er) Die Stimmung (-en) Die Fläche (-n) |
la couleur le contraste... ...de couleur Le motif la forme le détail la lumière l’ambiance la surface |
Pour citer cette ressource :
Iris Cussac, "Analyse d'oeuvre - «Hymne à la joie», «Fresque de Beethoven» 1902. Gustav Klimt", La Clé des Langues [en ligne], Lyon, ENS de LYON/DGESCO (ISSN 2107-7029), juin 2020. Consulté le 09/09/2024. URL: https://cle.ens-lyon.fr/allemand/arts/peinture-et-sculpture/dossier-gustav-klimt/hymne-a-la-joie-fresque-de-beethoven-gustav-klimt-1902-vienne-palais-de-la-secession