Défendre l’arabité au IXe siècle - Al-Gahiz et Ibn Qutayba : deux prosateurs aux prises avec la Su'ubiyya
Quand ? | Le 03/05/2023 |
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Où ? | Ciham-Éditions |
Éditeur : Ciham-Éditions
1ére édition
Collection : Mondes médiévaux
Thème : Histoire - géographie - archéologie
Auteur(s) : Tesrif Mulay Mustapha
Langue : Français
Tout en revenant sur le thème de la Šuʿūbiyya déjà largement traité dans les études consacrées à la littérature arabe médiévale, l’auteur met ici l’accent sur le patrimoine culturel de la ğāhiliyya à travers le mythe des Arabes de la période antéislamique, véritable matière première culturelle et morale de la littérature, de l’adab anti-Šuʿūbiyya. L’étude des œuvres majeures – les plus anciennes sur ce thème – de deux auteurs arabes prolixes du IIIe/Xe siècle, al-Ǧāḥiẓ (mort en 255/869) et Ibn Qutayba (mort en 276/889), permet de mettre en évidence le changement de paradigme dans leur approche respective de l’arabité, via des modalités argumentatives cherchant à influencer le regard sur les Arabes et les ʿaǧam (non-Arabes) de leur époque. Au IXe siècle, la société abbasside était arrivée à un stade suffisamment avancé de « complexification » pour donner jour à des écrits de ce type, et assez mûre pour favoriser une certaine concordance entre ethnicité plurielle d’un côté (Arabes au sens ethnique, généralement membres de l’aristocratie, Persans, sédentaires urbains et ruraux locuteurs du syriaque – anbāṭ –, Coptes, Byzantins, Amazighs, Africains, Indiens, Turcs, etc.) et religion musulmane de l’autre.
En revisitant les écrits de ces deux grands polygraphes, l’auteur dévoile les mécanismes d’une pensée participant à la construction identitaire de l’individu musulman et étudie en outre les éléments discursifs et les formes de récit permettant cette réorientation du sens de l’« arabité » en faveur d’une communauté musulmane unifiée et forte. Repenser ainsi la Šuʿūbiyya, c’est en remodeler la vision par un contre-discours (anti-Šuʿūbiyya) en vue de l’inscrire dans une perspective politique au service d’une communauté consolidée et débarrassée des maux générés par les revendications d’appartenance à une ethnie ou à un clan différent : est-ce là un cas d’aliénation au sens marxiste du terme ? Les pages de ce livre montrent qu’il s’agit bien au contraire d’un projet politico-idéologique ambitieux.